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Sabil al-Iman (n°84) - Le corps, le sport et la spiritualité : quand la force devient foi

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Par Cheikh Khaled Larbi

Entre le souffle et la sueur, il y a prière.

Entre le ring et la prosternation, il y a lumière.

Quand le corps se discipline, l’âme respire ;

Et quand la foi s’entraîne, le cœur s’élève et s’inspire.

 

Le corps : un dépôt sacré, un temple de responsabilité

 

Dans la vision islamique, le corps humain n’est pas un simple assemblage de muscles, d’os et de nerfs. Il est une amana, un dépôt confié par Dieu à l’homme, une responsabilité qui appelle respect, équilibre et gratitude. Le Prophète ﷺ disait : « Ton Seigneur a un droit sur toi, ton corps a un droit sur toi et ta famille a un droit sur toi. » (Rapporté par El-Boukhâri).


Cette parole, brève et majestueuse, fonde toute éthique du corps en islam. Elle nous enseigne que le soin du corps n’est pas un culte de soi, mais un acte de foi. Entretenir sa santé, c’est honorer Celui qui nous a créés.


Le sport, dans cette perspective, n’est pas une vanité moderne, mais une continuité de la spiritualité prophétique. Le Prophète ﷺ organisait des courses, encourageait la force et l’endurance. Il disait : « Le croyant fort est plus aimé d’Allah que le croyant faible, et dans chacun il y a du bien. » (Muslim).


Le croyant fort : non seulement par ses muscles, mais par sa maîtrise de soi.


La force, ici, n’est pas domination, mais équilibre intérieur, fruit du « jihad En-nafs », le combat spirituel contre les passions.


Le sport devient alors un miroir du jihad : effort, patience, douleur maîtrisée, persévérance.


Chaque entraînement devient un rappel, chaque respiration une invocation silencieuse.

 

Le sport comme école de foi et d’humilité

 

Le sport, lorsqu’il est vécu avec intention (niya), devient un champ d’éducation spirituelle.


Il apprend la discipline, le respect, la modestie. Dans l’arène du sport comme dans celle de la vie, la victoire n’est jamais purement physique : elle est avant tout morale et intérieure.


La boxeuse algérienne Imane Khelif incarne à merveille cette dignité. Sur le ring, elle combat sans se renier. Son voile intérieur vaut plus qu’une médaille : c’est le symbole d’un corps croyant, maîtrisé, offert à la vérité de l’effort. Quand certains ont douté de sa féminité, elle a répondu sans cris, sans colère : par sa persévérance, par sa foi.


Le Coran nous enseigne : « Et ne jetez pas vos mains dans la destruction. » (Sourate El-Baqara, 2 :195)


Autrement dit : ne détruisez pas votre santé, ne méprisez pas ce corps que Dieu a façonné pour vous servir et Le servir. Prendre soin de soi, c’est honorer la vie. Préserver son énergie, c’est préserver son lien avec le divin. Dans chaque sport sincère, il y a un parfum de prosternation : le souffle qui se cherche, le cœur qui s’élève, le regard qui se tourne vers le ciel après la victoire ou la défaite.

 

Le croyant ne cherche pas à être le premier pour être applaudi, mais pour se surpasser en conscience.

 

Imane Khelif, Brigitte Macron : la dignité face au jugement

 

Notre époque aime juger avant de comprendre. Elle déshabille les âmes sous le regard des caméras.


Elle confond le droit de savoir avec la violence de soupçonner. Deux femmes, venues de mondes si différents, ont pourtant connu la même blessure du doute : Imane Khelif, championne du monde, dont la féminité fut niée par ignorance et par peur ; Brigitte Macron, Première dame de France, calomniée par une rumeur absurde sur son identité.

 

Toutes deux ont subi l’injustice du regard social. Toutes deux ont résisté sans haine, par la dignité du silence. Leurs visages racontent l’histoire des femmes jugées par le monde et reconnues par Dieu seul.


Elles rappellent à l’humanité que le respect du corps est d’abord respect de l’âme.


Le sport, chez Imane, devient un acte de résistance spirituelle : chaque coup de poing sur le ring est une prière muette contre les préjugés.


Chez Brigitte, le sourire calme face à la rumeur devient le visage d’une foi civique : croire encore en la dignité humaine malgré la cruauté du verbe.


Le Coran, sans nommer leurs noms, a déjà parlé d’elles : « Ceux qui lancent des accusations contre les femmes chastes, croyantes et innocentes seront maudits ici-bas et dans l’au-delà. » (En-Nour, 24 :23)


Cette parole ne s’adresse pas seulement aux calomniateurs d’hier, mais à chaque internaute d’aujourd’hui, chaque regard moqueur, chaque tweet qui blesse.

 

Le corps croyant : discipline, pudeur et puissance

 

Dans l’ère des images et du corps-marchandise, le croyant apprend à réhabiliter le corps comme signe et non comme vitrine. L’islam ne méprise pas le corps ; il l’illumine par la pudeur et la sincérité.

La pudeur (Hayâ) n’est pas honte de soi, c’est la noblesse du geste, la maîtrise du regard, la beauté discrète. Le Prophète ﷺ disait : « La pudeur ne produit que du bien. » (Boukhâri et Muslim).


Ainsi, la sportive croyante qui monte sur un ring, une piste ou un terrain, ne cherche pas à plaire au public, mais à honorer son Créateur par la perfection du mouvement. Quand elle frappe, elle frappe juste ; quand elle tombe, elle se relève ; quand elle gagne, elle rend grâce ; quand elle perd, elle médite.


Dans le Coran, Dieu rappelle : « En vérité, Nous avons honoré les enfants d’Adam. » (El-Isra, 17 :70)


Cet honneur inclut le corps, non pas pour l’idolâtrer, mais pour le servir avec intelligence, respect et foi.


Le sport devient alors un espace où la laïcité, la foi et la dignité peuvent se rencontrer : quand la République protège la liberté de conscience, et quand le croyant respecte la neutralité sans effacer sa spiritualité.


La boxeuse voilée, le coureur prosterné après l’arrivée, la nageuse pudique : tous rappellent que la foi n’est pas obstacle, mais horizon.

 

Le sport comme voie vers la santé du cœur

 

Le Prophète ﷺ a résumé la santé spirituelle en une phrase, certes lumineuse : « Il y a dans le corps un morceau de chair, s’il est sain tout le corps est sain, et s’il est corrompu tout le corps est corrompu : c’est le cœur. » (Boukhâri et Muslim). L’âme et le corps ne sont pas deux mondes étrangers.


Celui qui s’entraîne pour purifier son souffle purifie aussi ses intentions.


La marche, la course, la boxe, la natation, tout peut devenir exercice du cœur quand il est accompagné de dhikr et de gratitude.


Dans un monde de sédentarité et de stress, le sport n’est plus un luxe, mais une thérapie spirituelle.


Il rétablit le lien entre l’homme et le rythme divin de la nature : le jour pour l’effort, la nuit pour la paix.


L’islam appelle à l’équilibre : ni ascèse destructrice, ni matérialisme épuisant. Le sport vécu en conscience rend au corps son rôle d’allié de l’âme. Le croyant ne fuit pas la douleur de l’effort : il la transforme en énergie de foi.

 

Foi, dignité et humanité : la triple victoire

 

Quand la société dénigre, le croyant s’élève.


Quand la rumeur insulte, la foi répond par le silence.


Quand l’injustice frappe, Dieu observe, et réhabilite.


Le sport, dans cette lumière, devient un symbole universel de justice : le ring, le terrain, la piste, tous rappellent le jour du jugement : là où chacun rendra compte de son effort, et non de son apparence.

Imane Khelif, par sa pudeur et sa puissance, devient une métaphore de la foi moderne : celle qui se bat sans crier, celle qui gagne sans trahir.


Et Brigitte Macron, blessée par les mots, rappelle que l’humiliation publique n’épargne personne, mais que la dignité, elle, demeure le dernier visage de l’âme humaine.


Le croyant, lui, apprend à regarder chaque être comme un champ sacré que Dieu seul connaît.


Ne juge pas les visages, car tu ignores les combats qu’ils portent.


Ne ris pas des blessures, car tu ne vois pas les prières qui les pansent. Le ring n’est qu’un mihrab, la sueur n’est qu’un dhikr, et la victoire n’est qu’un miroir du cœur purifié.

 

Que le sport soit prière,

Que le corps soit lumière,

Et que la foi demeure la plus belle manière

De rester debout, digne, et entière.



*Article paru dans le n°84 de notre magazine Iqra.



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