Hamza Boubakeur (de 1957 à 1982)
Recteur de la Grande Mosquée de Paris de 1957 à 1982.
Hamza Boubakeur, de son nom véritable Aboubakeur ben Hamza ben Kadour est né le 15 juin 1912 en Algérie dans l’Oasis de Brezina, aux confins des hauts plateaux sahariens de l’atlas et du grand sud.
Il appartient à la famille des Ouled Sidi Cheikh, Avant sa naissance, sa tribu s’était illustrée de 1864 à 1882 par une lutte contre la pénétration française dans le sud algérien, pendant laquelle elle avait subi de nombreux sacrifices et perdu
Si Slimane Ben Hamza, vainqueur du colonel de Beauprètre en 1864.
Le destin de Si Hamza Boubakeur devait suivre les bouleversements d’un monde qui, au XXe siècle, allait passer de la tradition la plus ancestrale aux apports universels de la culture française, tout en maintenant un équilibre permanent entre tradition et modernité.
Le début de son existence le plonge profondément dans sa culture saharienne où l’étude coranique et l’environnement marquent d’une trace indélébile l’esprit de l’enfant précoce qui, à l’âge de 12 ans, à la surprise générale, réalise l’exception d’être admis au lycée d’Oran et d’y réussir brillamment, non sans une certaine méfiance de son père, grand seigneur tribal.
Au cours de ces années, il participe à la consultation lancée par le ministre de l’Intérieur Jean-Pierre Chevènement en vue de créer une institution chargée d’organiser le culte musulman en France. Il œuvre à la fondation du Conseil Français du Culte Musulman (CFCM) en 2003, sous l’égide du ministre de l’Intérieur Nicolas Sarkozy, qui le nomme également à la commission de réflexion juridique sur les relations des cultes avec les pouvoirs publics, dite commission Machelon (2005-2206). Membre du bureau exécutif du CFCM, il en devient le vice-président en 2008.
Littéraire et mathématicien à la fois, Hamza Boubakeur acquiert une solide formation. La mort de son père en 1932 l’empêche de réaliser son vœu de devenir médecin et l’oriente vers la licence puis l’agrégation d’arabe. Devenu professeur en 1936, il enseigne dans les deux collèges (garçons et filles) de Philippeville (Skikda).
La Seconde Guerre mondiale est une période noire. Il est révoqué de son poste de professeur par l’administration vichyste, et part à Alger où ses connaissances de l’allemand, de l’arabe et du français le désignent tout naturellement aux émissions de Radio Alger, une fois la ville passée aux mains des Alliés.
Il enseigne au lycée Bugeaud à Alger et se lie avec les mouvements nationalistes algériens en ouvrant les colonnes de son journal As-Salam Ifriqiya. Son engagement de jeune intellectuel pour la digne reconnaissance des musulmans en Algérie, pour la place de la femme dans la société et l’essor de l’éducation, pour la résolution des mille et un conflits qui opposent le Sud et le Nord algériens, dont il souhaite incarner le trait d’union, lui vaut d’être grandement remarqué par l’administration coloniale et à Paris même, où il s’était engagé en politique avec ses amis socialistes dès 1936.
Après la bataille d’Alger de 1957, de sérieuses difficultés tourmentent tous les intellectuels en vue. Il est appelé à Paris, où se discute la succession de Si Kadour Ben Ghabrit, fondateur de la Mosquée de Paris, mort en 1954. A la fin de l’été, Si Hamza Boubakeur est nommé directeur de la Grande Mosquée de Paris, par le gouvernement français qui finance encore à cette époque l’institution.
En 1958, malgré toutes ses réserves, il est élu député des Oasis sous la première législature de la Ve République, puis devient président du Conseil général de cette région d’Algérie pour laquelle il se consacre corps et âme.
A la Grande Mosquée de Paris, Si Hamza Boubakeur exerce un rayonnement extraordinaire par ses travaux et ses conférences. Il recueille la haute estime des académies et des institutions internationales auprès desquelles il expose les valeurs souvent méconnues de l’Islam.
En 1965, il est chargé de la traduction et du commentaire du saint Coran, tache qui va le mobiliser durant une vingtaine d’années. Ce travail est édité et réédité en France et dans le monde entier. Il constitue, par ses commentaires tirés de la tradition comme des temps présents, et par une connaissance profonde de l’arabe et du français, un travail majeur au service de l’Islam et de la francophonie. En 1985, il publie son Traité moderne de théologie musulmane (Éd. Maisonneuve & Larose) et traduit la Burda de Al Busiri, poème panégyrique sur le Prophète de l’Islam. Il publiera également Un saint soufi algérien : Sidi Cheikh (Éd. Maisonneuve & Larose, 1990) et un autre ouvrage consacré à des poètes sahariens célèbres.
Ses publications ne se comptent plus et ses avis sont recherchés dans le domaine du droit, de l’histoire, de la philosophie, notamment dans le nouveau champ de la bioéthique qui lui permet d’exposer la doctrine de l’Islam en matière de transplantation, de génétique, d’euthanasie, de procréations assistées, par des fatwas admises dans le monde musulman. Sa notoriété lui vaut l’honneur d’être admis par ses pairs de l’Université El-Azhar en Égypte et d’échanger avec les Awkafs d’Alger, de Tunis, d’Egypte ainsi qu’avec les principaux cheikhs d’Arabie.
Tout au long de son rectorat, il travaille à la reconnaissance des musulmans de chaque région du monde, voyageant de l’URSS à l’Afrique subsaharienne – son nom sera même adopté par des universités du Mali et du Sénégal – et à l’amitié entre les peuples. Au cours de la décennie 1960, marquée par les ouvertures de Vatican II et la Guerre des Six-Jours, il était d’ailleurs devenu l’un des précurseurs du dialogue interreligieux en co-fondant la Fraternité d’Abraham.
Si Hamza Boubakeur s’éteint le 4 février 1995 à Paris. enterré aux côtés de ses ancêtres, dans les sables de sa terre natale.
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