top of page

Le Hadith de la semaine (n°60) - L’édifice compact… lorsque les textes se transforment en comportements


D’après Abou Moussa Al-Ash‘ari (que Dieu l’agrée), le Prophète ﷺ a dit :


« "Le croyant est pour le croyant comme les pierres d’un édifice : ils se soutiennent mutuellement." Et il entrelaça ses doigts pour illustrer ses propos. »

Hadith rapporté par Al-Bukhari et Muslim

 

Lorsque les épreuves se succèdent et que les calamités frappent les fondements des lois divines et des règlesimmuables, édifiées sur les évidences de la nature humaine, les raisons saines des esprits et les élans des cœurs éveillés, alors les paroles prophétiques deviennent plus que de simples enseignements : elles se font cri de la conscience, position existentielle, et scène vivante dans laquelle s’illustre la sincérité de la foi, la profondeur de la fraternité et la noblesse d’appartenance à cette communauté bénie : la communauté du juste milieu et du témoignage.


« Nous avons aussi fait de vous une communauté du juste milieu pour que vous soyez témoins vis-à-vis des hommes et que le Messager soit témoin vis-à-vis de vous ». [Sourate al-Baqara, verset 143].


Parmi ces paroles prophétiques qui se dressent comme des repères dans l’histoire de cette communauté, figure notre hadith de la semaine : « Le croyant est pour le croyant tel un édifice compact, dont les parties se soutiennent mutuellement. »


Ce hadith, à la lumière des évènements de cette semaine, ne saurait être réduit à une simple leçon d’exhortation ou à des commentaires théoriques ; il s’impose plutôt comme un appel décisif - et non anecdotique - à ce que chaque membre de cette communauté soit une pierre vivante dans l’édifice de la communauté, épaulant ses frères, soutenant leurs épreuves, partageant leurs peines, tout comme il se réjouirait de leurs joies.


Comme l’a dit le Prophète (paix et bénédictions sur lui) : « L’exemple des croyants dans leur amour mutuel, leur miséricorde et leur compassion est celui d’un corps unique : lorsqu’un de ses membres souffre, c’est tout le corps qui réagit par l’insomnie et la fièvre ». [Rapporté par Muslim].


L’édifice ne sera achevé qu’avec ce corps vivant, qui ressent, souffre et se lève en soutien aux siens.


Le hadith de cette semaine prend chair dans un contexte où les âmes sont injustement arrachées, à l’image du martyre de notre frère malien Aboubakar Cissé (qu’Allah l’agrée) tombé en prosternation, dans un instant de pureté et d’humilité. Son sang n’a pas seulement été versé du corps d’un homme, mais a éclaboussé la conscience de l’humanité tout entière, et souillé le front des institutions mondiales et des prétendues chartes des droits humains.


Face à cela, la réaction concrète de la Grande Mosquée de Paris a constitué une éclatante illustration de cet édifice solidaire, lorsqu’elle a pris l’initiative d’accueillir la dépouille du martyr, de célébrer sur lui la prière funéraire, en signe d’empathie pour sa douleur, de fidélité à son sang versé, de reconnaissance de ses droits, et de défense des valeurs de vérité et de dignité.


Il ne s’agissait nullement d’un simple acte administratif ou d’un rituel formel, comme certains pourraient le penser, mais d’une position à la fois spirituelle et profondément humaine, une mise en pratique sincère de cette parole du Prophète ﷺ : « Le musulman est le frère du musulman : il ne l’opprime pas, ne l’abandonne pas, ne lui ment pas et ne le méprise pas. » (Hadith rapporté par Muslim)


À une époque où les valeurs s’effacent, et où s’élèvent les voix de l’indifférence et de l’hésitation, ce hadith trace la ligne de conduite : soutenir un frère opprimé n’est pas un choix secondaire, mais une obligation religieuse et morale qui ne souffre ni report, ni compromis.


Dans ce cadre, notre hadith de la semaine ne saurait être lu comme un simple rappel : il est l’appel à un projet de vie, dont le titre serait : [Unis pour former un édifice compact, tel une montagne que les vents de l’injustice ne sauraient ébranler, ni les flèches de la trahison transpercer].


La fraternité en Allah n’est pas un slogan à répéter, mais une responsabilité à porter


La collaboration dans le bien et la piété n’est pas un luxe pour les périodes d’aisance, mais une obligation individuelle en temps de crises et d’épreuves.


Allah (Exalté soit-Il) dit : « Les croyants ne sont que des frères » [Sourate al-Houjourat, verset 10], et Il dit : « Et entraidez-vous dans la bienfaisance et la piété » [Sourate al-Ma’ida, verset 2].


Notre message aujourd’hui, depuis la tribune de la revueIqra’ de la Grande Mosquée de Paris, est un appel sincère à la dénonciation et un étendard dressé pour la défense des opprimés. Nous proclamons notre refus de l’injustice et notre solidarité avec les innocents, aussi bien des individus que despeuples, sans considération de leur couleur, de leur langue ou de leur patrie, en vertu d’une nature pure qui rejette la tyrannie, d’une religion qui élève l’étendard de la justice, de la fraternité et de la liberté, et notamment d’une conscience quirefuse le silence et blâme ceux qui s’y résignent.


Sois donc une pierre vivante dans l’édifice de cette communauté : qu’elle ne s’effondre pas par ta faiblesse, mais qu’elle se renforce par ta foi, s’élève grâce à ta présence, et se soude par ta conscience et l’ardeur de ton cœur.


N’attends pas que la communauté t’appelle : engage-toi sans tarder dans ses rangs, deviens une part de sa conscience, et le porteur de son message.

 

Le Hadith de cette semaine est un appel noble à transformer les textes en positions vivantes, qui ne meurent pas avec ceux qui les ont portées, à faire de la prédication un engagement collectif, sérieux et constant, et à incarner une solidarité sincère, dépourvue de tout double discours, au sein du corps d’une nation à laquelle son Prophète a demandé de s’unir comme les pierres d’un édifice cimenté par la foi.


Alors,


Es-tu prêt à devenir une pierre vivante de ce noble édifice ?



*Article paru dans le n°64 de notre magazine Iqra.

bottom of page