Le Coran m’a appris (n°1) - Les chrétiens, entre reconnaissance divine, fraternité humaine et mémoire prophétique
- Guillaume Sauloup
- il y a 14 heures
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Le Coran m’a appris que l’amour ne connaît pas de murs,
Que la foi sincère unit, même sous des noms obscurs.
Les chrétiens, dans l’Écriture, sont décrits avec lumière,
Comme des gens du Livre, de cœur, de prière.
J’ai appris, dans les versets, que l’autre n’est pas l’ennemi,
Mais souvent un frère, un proche, un ami.
Et quand l’humain devient miroir de l’Infini,
La croix et le croissant s’inclinent devant Celui qui bénit.
Le Coran parle des chrétiens avec noblesse et nuance
Le Coran n’invite jamais à mépriser les chrétiens. Au contraire, il évoque avec finesse une réalité complexe mais empreinte d’humanité. L’un des versets les plus frappants à ce sujet se trouve dans la sourate al-Ma’ida (5:82) : « Tu trouveras certes que les plus disposés à aimer les croyants sont ceux qui disent : ‘Nous sommes chrétiens.’ C’est qu’il y a parmi eux des prêtres et des moines, et qu’ils ne s’enflent point d’orgueil. »
Ce verset ne parle pas d’un groupe idéalisé, mais de personnes sincères dans leur spiritualité, marquées par l’humilité, la tendresse, la compassion. Le Coran reconnaît la dévotion monastique, le sens du sacrifice, la pudeur spirituelle de ces hommes et femmes du Livre.
Dans un monde marqué par les conflits et les crispations identitaires, cette vision coranique est révolutionnaire : elle nous invite à regarder l’autre non comme un danger, mais comme un signe d’Allah.
L’héritage prophétique : des relations fondées sur la justice
Le Prophète Mohamed (paix sur lui) a incarné cet esprit de respect et de coopération. Lors de la célèbre Constitution de Médine, il inclut les chrétiens et les juifs comme membres à part entière de la communauté politique. Il leur garantit liberté religieuse, protection et autonomie : « Les juifs (et donc par extension, les autres Gens du Livre) forment une communauté avec les musulmans. » (Charte de Médine)
Et lorsque des chrétiens de Najran vinrent débattre avec lui à Médine, le Prophète leur offrit l’hospitalité, les laissa prier dans sa propre mosquée, et conclut avec eux un pacte de paix, sans contrainte. Cette scène devrait inspirer tout croyant sincère, car elle révèle que l’amour de Dieu passe par le respect de la dignité de l’autre.
Témoignages croisés : quand les cœurs se reconnaissent
De nombreuses figures chrétiennes contemporaines ont témoigné d’un respect profond pour l’islam. Voici quelques exemples :
Hans Küng, théologien suisse, a déclaré : « L’islam est porteur d’un projet spirituel cohérent. Son respect pour la prière, la justice sociale, la famille, est une inspiration pour nous, chrétiens. »
Karen Armstrong, ancienne religieuse devenue spécialiste des religions comparées, écrit dans Mohamed, A Prophet for Our Time : « Le Prophète a traité les chrétiens avec une bienveillance rare. Il a compris que l’amour de Dieu unit plus qu’il ne divise. »
Frère Christian de Chergé, moine trappiste assassiné à Tibhirine en Algérie, disait de ses voisins musulmans : « Ils prient Dieu avec tout leur cœur. Leur foi est simple, belle, solide. J’ai appris d’eux le silence, l’accueil, l’humilité. »
Ces voix chrétiennes honorent l’âme de l’islam, et témoignent que la foi sincère traverse les frontières confessionnelles.
Le pape François : un homme de Dieu proche des musulmans
Le pape François, récemment décédé, fut un passeur de paix. Il a plusieurs fois rencontré des imams, visité des mosquées, et reçu à deux reprises le recteur de la Grande Mosquée de Paris. Ce geste, loin d’être purement protocolaire, révèle une profonde volonté de dialogue.
En 2019, il signe avec Cheikh al-Azhar Ahmed al-Tayyeb le document sur la “Fraternité humaine”, appelant à : « Un vivre-ensemble dans le respect, la justice, la paix, la protection des lieux de culte et des croyants de toute religion. »
À sa mort, le recteur Chems-eddine Hafiz a assisté à ses funérailles, lui rendant un hommage fort, rare, fraternel. C’est un acte historique, qui incarne parfaitement l’esprit du Coran : honorer la foi sincère, d’où qu’elle vienne.
Des alliances pour le bien commun : l’éthique partagée
L’islam et le christianisme se retrouvent sur de nombreux principes éthiques : l’amour du prochain, la protection des faibles, l’accueil de l’étranger, le respect de la vie, la lutte contre l’injustice.
Dans un monde en crise, ces valeurs doivent être le socle d’une action commune. C’est pourquoi de plus en plus d’associations interreligieuses œuvrent dans les quartiers populaires, les écoles, les hôpitaux, les prisons.
Exemple concret : à Marseille, une mosquée et une paroisse chrétienne ont lancé ensemble une initiative appelée « Solidarité Sacrée » : repas partagés, collectes de vêtements, prières pour la paix. Le Coran l’avait annoncé : « Coopérez dans le bien et la piété. » (Sourate Al-Ma’ida, 5 :2)
Quand la mort rassemble les vivants : la leçon du pape
La mort du pape François est un événement spirituel mondial. Elle rappelle à chacun que le pouvoir, la religion, la richesse s’effacent un jour devant l’éternité. Mais elle révèle aussi une chose : les ponts qu’il a bâtis lui survivront. L’image du recteur de la mosquée de Paris parmi les dignitaires chrétiens, recueilli, solidaire, marque les esprits. Elle nous enseigne que le respect entre les croyants est un héritage sacré.
Dans la tradition musulmane, on invoque la miséricorde pour toute personne sincère, croyante, respectueuse du divin. Le Prophète lui-même s’est levé quand passait un cortège funéraire juif, et dit à ses compagnons : « N’était-ce pas une âme humaine ? » (Sahih Muslim)
Le Coran m’a appris que le chrétien peut être un frère,
Qu’il partage avec moi la lumière du Père.
Que sous la croix ou le croissant, un même souffle nous lie,
Celui de l’âme qui cherche, qui doute, qui prie.
Et si le Prophète honorait moines et cloches,
C’est qu’il voyait dans l’homme une lumière farouche.
Alors moi, musulman, dans le tumulte des temps,
Je tends la main au chrétien, humble et confiant.
*Article paru dans le n°63 de notre magazine Iqra.
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