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À Bobigny, hommage à l’imam-résistant Abdelkader Mesli

Dernière mise à jour : il y a 2 jours



À Bobigny, le recteur Chems-eddine Hafiz a participé à la cérémonie d’inauguration de la rue Abdelkader Mesli, en présence de son fils et de sa petite-fille, du maire Abdel Sadi et du consul d’Algérie à Bobigny.


Né en Algérie, Abdelkader Mesli fut imam de la Grande Mosquée de Paris et aumônier à l’hôpital de Bobigny. Durant la Deuxième Guerre mondiale, sous la direction de Kaddour Benghabrit, premier recteur, il participa au sauvetage de juifs puis à un réseau de résistance. Il fut arrêté et déporté en Allemagne en juillet 1944.


Le recteur : « Lui rendre hommage, c’est affirmer une mémoire commune, c’est écrire le futur avec l’héritage de ceux qui ont tendu la main quand le monde se refermait. »








CÉRÉMONIE D’INAUGURATION DE LA RUE ABDELKADER MESLI

DISCOURS DE CHEMS-EDDINE HAFIZ, RECTEUR DE LA GRANDE MOSQUÉE DE PARIS


Monsieur le Maire,

Monsieur le Consul d’Algérie à Bobigny,

Monsieur le Président d'honneur de l'Amicale des Déportés Résistants du Train fantôme,

Chère famille d’Abdelkader Mesli,

Mesdames, Messieurs,

Chers amis,

 

Il y a 80 ans, la Deuxième Guerre mondiale et ses atrocités prenaient fin.

 

Alors qu’une nouvelle aube se levait et que s’imposait le devoir de mémoire, certains visages, certains noms, certaines souffrances, certains actes héroïques restèrent dans l’ombre de la reconnaissance nationale.

 

80 ans plus tard, nous sommes réunis pour éclairer l’un de ces destins oubliés et rendre hommage à Abdelkader Mesli, imam de la Grande Mosquée de Paris, résistant, juste parmi les hommes de son temps.

 

Monsieur le Maire,

 

Je veux vous témoigner toute ma gratitude pour la décision que vous avez prise, pour cette cérémonie, dont chacun peut comprendre la portée symbolique.

 

Dans les quelques kilomètres qui séparent la ville de Bobigny et le 5e arrondissement de Paris, où se dresse le minaret de la Grande Mosquée de Paris, existe une histoire singulière que nous devons raconter.

 

Cette histoire nous transporte vers les tranchées et le cataclysme de la Grande Guerre.

 

Elle nous raconte ces milliers de soldats de confession musulmane tombés, loin de leurs foyers, pour sauver la France.

 

À cette époque où la réunification du pays, dans sa diversité, trouvait un sens vital, la République avait su être à la hauteur en décidant la construction de la Grande Mosquée de Paris, entre 1922 et 1926, puis, dans un même élan et avec les mêmes artisans, du cimetière et de l’hôpital « franco-musulman » de Bobigny.

 

C’est à cette époque qu’Abdelkader Mesli, fils d’Algérie, s’installa en France, comme d’autres anonymes, et qu’il devint imam à la Grande Mosquée de Paris et aumônier à l’hôpital de Bobigny.

 

Avec foi et humilité, en voulant aider ses prochains, il participa à faire de ces lieux des repères essentiels pour les musulmans et pour tous ceux qui leur témoignaient leur amitié.

 

Sous la direction de Si Kaddour Benghabrit, fondateur et premier recteur, il fera de la Grande Mosquée de Paris une maison de Dieu où s’expriment les plus hautes valeurs de l’islam.

 

Ensemble, et avec d’autres encore, ils en feront un refuge d’humanité pendant les heures sombres de l’Occupation nazie, en venant au secours des juifs pourchassés, en leur délivrant des faux certificats, en les abritant au sein même de la mosquée.

 

Arrêté le 5 juillet 1944 à Bordeaux pour participation à un réseau de résistance, Abdelkader Mesli fut déporté en Allemagne par le « train fantôme », et survécu à l’horreur des camps de concentration.

 

Durant ces années de peur et de trahison, Abdelkader Mesli choisit la bravoure et la fraternité.

 

Abdelkader Mesli et Si Kaddour Benghabrit ne sauvèrent pas seulement des vies : ils incarnèrent une vision de l’islam fondée sur l’empathie, la justice et la sacralité de toute existence, sur les pas de l’Émir Abdelkader qui, cent ans plus tôt, était venu au secours des chrétiens de Damas.

 

Il est ainsi des figures discrètes dont le nom doit résonner, avec une clarté nouvelle, à la lumière des idéaux qu’elles ont portés dans les heures les plus sombres de notre passé.

 

L’imam Abdelkader Mesli est de celles-là.

 

Face à la montée actuelle des replis identitaires, des projets de division, des discours stigmatisant les citoyens de confession musulmane, son exemple rappelle que nous, musulmans de France, avons offert à notre pays des bâtisseurs de paix et prospérité, et en offrirons encore grâce aux nouvelles générations.

 

La ville de Bobigny, par son geste, a compris l’enjeu.

 

La ville de Paris l’a également saisi, en choisissant de renommer le parvis de la Grande Mosquée de Paris au nom d’Abdelkader Mesli.

 

Mesdames, Messieurs,

 

En ce moment d’émotion et de souvenir, je veux appeler la République à renouveler sa reconnaissance, à valoriser les contributions de nos concitoyens musulmans, à privilégier tout ce qui nous relie, pour vaincre ce qui nous sépare.

 

Abdelkader Mesli nous a montré qu’il est possible d’être à la fois un croyant et un défenseur des idéaux républicains et universels.

 

Lui rendre hommage, c’est affirmer une mémoire commune, c’est écrire le futur avec l’héritage de ceux qui ont tendu la main quand le monde se refermait.

 

Que sa mémoire continue d’inspirer les consciences.

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