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Le recteur Chems-eddine Hafiz auditionné par la CNCDH sur la lutte contre le racisme

Dernière mise à jour : 19 sept. 2023

Le recteur Chems-eddine Hafiz était auditionné ce mercredi matin par la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) en vue de l'élaboration de son Rapport 2022 sur la lutte contre le racisme, l'antisémitisme et la xénophobie.


Retranscription de son intervention :

CNCDH - Rapport lutte contre le racisme - Audition Chems-eddine Hafiz - janvier 2023
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Mesdames, Messieurs,


Je souhaite tout d’abord remercier les membres ici présents de la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) et son président Maître Jean-Marie Burguburu.


Je vous remercie pour cette occasion qui m’est donnée de m’exprimer, ce matin, sur le sujet prioritaire de la lutte contre le racisme, l'antisémitisme et la xénophobie, et de pouvoir ainsi contribuer au rapport annuel très attendu de la CNCDH.


La lutte contre le racisme, l'antisémitisme et la xénophobie est l’une des nobles missions de la Commission.


Elle est aussi au cœur de mon engagement et de mon action à la tête de la Grande Mosquée de Paris.


*


Je vais entrer dans le vif du sujet par un tour d’horizon des données statistiques à notre disposition.


Ces éléments statistiques vous sont bien entendu connus, mais il me semble important de s’y arrêter quelques minutes afin de mettre en lumière certains enjeux et certaines conceptions que j’évoquerai plus en détail par la suite.


Selon le ministère de l’Intérieur, les services de police et de gendarmerie ont enregistré 12 500 infractions à caractère raciste, xénophobe ou antireligieux durant l’année 2021. Ces actes ont augmenté de 13% entre 2019 et 2021. Parmi eux, les injures, les provocations et les diffamations publiques représentent 65% des crimes ou des délits enregistrés « en raison de l'ethnie, de la nation, d'une prétendue race ou de la religion ».


En 2021, selon la Plateforme d’harmonisation, d’analyse, de recoupement et d’orientation des signalement (PHAROS), 8 907 signalements ont été faits pour « provocation publique à la haine et à la discrimination raciale, ethnique ou religieuse » et 4 821 pour « injures et diffamations xénophobes ou discriminatoires ». Ces chiffres sont relativement stables depuis la création de la plateforme.


Selon la cellule « Anticipation & Analyse Sociétale » du Service central du renseignement territorial (SCRT), qui travaille sur le terrain, avec les représentants du culte musulman, 116 faits antimusulmans ont été recensés entre les mois de janvier et de juillet 2022. 49 de ces faits ont touchés des personnes, 67 ont touché des biens. En 2021, le nombre de ces faits s’élevait à 213, sur un total de 1 659 actes antireligieux. Le SCRT a observé un pic de faits antimusulmans au cours de l’année 2015, tout comme la plateforme PHAROS, ce qui les a amené à corréler pareille hausse aux terribles attentats survenus cette année-là.


Les statistiques que je viens de présenter sont nécessaires pour saisir l’évolution globale du racisme dans notre pays.


Nous en connaissons les limites, et parmi elles la difficulté à qualifier la nature des actes – j’y reviendrai – et à quantifier les actes qui ne font l’objet d’aucun signalement ni d’aucune plainte. D’après l’enquête « Cadre de vie et sécurité » du ministère de l’Intérieur, daté de 2020, seuls 2% des victimes d’injures et 14% des victimes de menaces à caractère raciste portent plainte.


*


Les représentations et les fédérations nationales du culte musulman ne disposent pas d’une structure fiable, à ce jour, qui pourrait recenser les actes commis contre nos concitoyens musulmans ou leurs lieux de culte.


Nous pouvons assez aisément constater une augmentation et une intensification dans le degré de violence des actes commis contre les lieux de culte musulman : incendies, dégradations matérielles, tags. La Grande Mosquée de Paris en a elle-même été l’objet avec des tags odieux découverts, en juillet 2021, sur les murs de l’annexe de son ancien centre de formation des imams à Martigues.


Au-delà, je n’ai pas de données inédites à vous présenter.


La Grande Mosquée de Paris et sa fédération, correspondant à plusieurs centaines de mosquées en France, représente toutefois une plateforme vers laquelle se tournent régulièrement les victimes et un réceptacle des sensibilités et des inquiétudes des musulmans dans notre pays.


C’est avec leur point de vue de la situation que je me présente devant vous aujourd’hui.


Lorsque nous parlons de racisme, nous parlons de faits, mais nous parlons aussi de ressenti, car ce ressenti a des incidences réelles. Les musulmans de France sont inquiets de l’évolution de la perception que leurs concitoyens ont d’eux et de leur religion. Ils sont troublés par la montée des discours médiatiques et politiques qui tendent, année après année, à les essentialiser, à les accuser de tous les maux et à les rejeter de la communauté nationale, de son histoire et de son présent.


Je rencontre chaque jour, à la Mosquée de Paris, des fidèles qui peuvent très bien avoir une vie parfaitement normale et confortable, une pratique religieuse respectueuse de tous, mais un sentiment de frustration voire d’insécurité engendré par le climat actuel.


Ce climat est en grande partie dû à la libération et à la banalisation d’une parole qui théorise, de manière pernicieuse, le déclin de la France et de son identité.


Il y a quelques jours, l’ancien candidat à la présidence de la République, Éric Zemmour, a été de nouveau condamné pour « provocation à la haine et à la violence » et « injures publiques envers un groupe de personnes en raison de leur origine », après ses propos sur les mineurs isolés tenus le 29 novembre 2020 sur la chaîne CNews.


Nous pouvons nous féliciter que la justice ait joué son rôle, mais dans ce cas comme dans d’autres, le mal est fait.


Pour autant, les voyants ne sont pas tous au rouge.


Vous me permettrez de m’appuyer sur le dernier rapport de la CNCDH, qui observe comment l’idée de race et de hiérarchie des races s’affaiblit en France, génération après génération, et combien les réactions racistes sont considérées comme injustifiables et la lutte contre le racisme comme une nécessité par une majorité des Français. Ce rapport, et le baromètre que vous avez réalisé avec Ipsos au printemps 2022, indiquent que 83% des Français pensent que les musulmans de nationalité française sont des Français comme les autres.


Ces estimations positives sont néanmoins contrebalancées par la montée de nouvelles formes, ou de formes résurgentes, de l’ethnocentrisme et du repli identitaire. Les opinions selon lesquelles « la France doit rester un pays chrétien », qu’« on ne se sent plus chez soit » ou encore que « l’insécurité est liée à l’immigration » gagnent ainsi du terrain.


La montée de ce type de préjugés s’explique aisément par l’évolution du contexte économique, social et politique de notre pays. Elle est voulue et normalisée, je l’ai dit, par un certain nombre de partis politiques et de personnalités influentes. Il est également impossible de ne pas la relier aux ignobles attentats qui ont été commis au nom de l’islam sur notre sol.


Si je ne m’étendrai pas sur les conséquences fortes et durables du terrorisme dans l’opinion des Français à l’encontre de l'islam et de nos concitoyens musulmans, je voudrais mettre en exergue l’influence délétère de l’islamisme qui agit dans le même sens.


L’islamisme prend appui sur le corpus et le sentiment religieux en les déviant vers une idéologie politique qui incite les musulmans à rejeter notre société, les principes qui nous unissent, et à vivre en autarcie.


Je ne cesse d’écrire et de dire qu’aujourd’hui nous affrontons deux extrémismes qui semblent en parfaite opposition mais qui, en réalité, s’alimentent, se complètent et se renforcent. L’extrémisme identitaire se sert de l’islamisme en le désignant comme l’islam pour démontrer son incompatibilité à la France. L’islamisme se sert quant à lui de l’extrémisme identitaire en le confondant à toute la société et à l’Etat français pour démontrer leur incompatibilité avec l’islam.


Je regrette que la confusion entre la religion, l’islam, et l’idéologie politique, l’islamisme, perdure, y compris dans les lieux des débats les plus élevés, et ne fasse pas l’objet de décryptages plus sérieux.


*


En abordant le rôle de l’islamisme dans les formes contemporaines du racisme, je souhaite m’arrêter quelques instants sur une question de terminologie qui, je le sais, suscite encore des discussions entre les membres de la Commission.


Je veux parler du terme « islamophobie ».


Nous le savons, aucun des qualificatifs des différentes formes de racisme n’est parfait. Celui d’islamophobie s’est imposé depuis de nombreuses années maintenant, et je comprends qu’il soit plus percutant à l’emploi. Je ne nie pas que le terme soit utilisé par beaucoup d’acteurs, si j’ose dire, de bonne foi, dans la lutte contre le racisme.


Le terme pose toutefois un premier problème de taille : ses promoteurs.


Je pense très clairement que ce terme d’islamophobie ne serait pas utilisé aujourd’hui sans la promotion qui en a été faite, et continue d’être faite, par les milieux islamistes, en France et dans le monde.


Je prendrais un exemple. En janvier 2021, lorsque nous avons écrit et présenté au Président de la République, Emmanuel Macron, la Charte des principes pour l’islam de France, l’un des points les plus contestés du texte, par les fédérations musulmanes qui ne l’ont d’ailleurs pas signé, était de dire qu’il n’existait pas de racisme d’État en France.


Dès la publication de la Charte, nous avons vu des acteurs politiques et médiatiques du monde musulman, que nous pouvons clairement associer aux mouvements islamistes, monter au créneau, avec une force que l’on ne perçoit pas assez en France, pour multiplier les déclarations, les publications, les reportages faisant état d’une islamophobie généralisée et quasiment légitimée par la puissance publique en France.


Le terme pose donc un deuxième problème : son usage.


Nous ne pouvons pas balayer du revers de la main le fait que le concept d’islamophobie est employé pour confondre, justement, l’islam et l’islamisme, et pour déjouer non seulement toute critique de l’islam mais surtout toute volonté d’adapter le discours religieux aux réalités de notre société.


Nous ne pouvons aussi laisser de côté le fait que ce concept amène les musulmans à penser que chaque problème qu’il vit, chaque discrimination qu’il subit, sont liés nécessairement à son appartenance religieuse, et qu’il lui est donc impossible de vivre ici en tant que musulman.


Je crois, au bout du compte, que ce terme concourt aux amalgames et aux discours racistes plus qu’il ne les dénonce.


Je préconise donc d’utiliser la terminologie d’actes et de propos antimusulmans.


Au-delà du terme « islamophobie », je souhaite également attirer votre attention sur l’évolution des catégorisations employées dans la lutte contre le racisme.


Le procédé de la catégorisation est difficile : il s’agit, pour nous, de ressortir les catégories telles qu’elles sont pensées par la population, tout en veillant à ce que notre emploi de telle ou telle catégorie ne favorise pas la discrimination qu’elle est sensée combattre au sein l’opinion.


Depuis vingt ans, nous observons un glissement du racisme contre les immigrés, les « arabes », les « maghrébins », les « noirs », vers le racisme contre les « musulmans ». Le baromètre CNCDH-Ipsos retient d’ailleurs la seule catégorie « Musulmans ».


Ce glissement reflète bien une évolution de la stigmatisation contre les musulmans liée – je l’ai déjà dit – au terrorisme, à l’islamisme et autres extrémismes ciblant les musulmans.


Elle ne doit cependant pas effacer les autres types de racisme, qui parfois s’entremêlent. Nous avons encore du travail pour mieux distinguer les faits ciblant une personne en raison de son appartenance réelle ou supposée à une religion – la loi elle-même n’est pas encore précise au sujet des actes antireligieux. Considérons que cette distinction est aussi celle des faits répréhensibles commis par une personne en raison de son appartenance réelle ou supposée à une religion, là où, aujourd’hui, des amalgames considérables sont propagés dès lors qu’un acte de délinquance ou un crime est commis par – je mets des guillemets – un « musulman ».


*


Comprenez, Mesdames, Messieurs les membres de la Commission, que la parenthèse ouverte sur des questions de terminologie n’est pas théorique : j’ai uniquement à l’esprit de trouver les solutions pour chaque personne qui pense que sa religion ou la religion de l’autre n’est pas compatible à notre pays.


Les solutions au racisme antimusulman sont diverses. Elles ne sont évidemment pas toutes de mon ressort ni de celui des responsables des cultes.


Le chantier le plus colossal, bien évidemment, est l’amélioration des conditions et des trajectoires socio-économiques de certains de nos territoires et d’une partie de notre jeunesse.


Il est un autre chantier, sécuritaire et judiciaire, que je ne me permettrais pas non plus de développer, à l’exception de la question de la sécurisation des lieux de culte.


Aucun lieu de culte n’est malheureusement à l’abri de méfaits, plus ou moins graves, et les responsables de ces lieux en ont désormais conscience. La sécurisation physique des lieux connaît des avancées substantielles, même si les protections sont encore loin d’être optimales. Il existe notamment les financements via le « programme K » du fonds interministériel de prévention de la délinquance.


Plus largement, les relations établies, tant au niveau national qu’au niveau local, entre les pouvoirs publics et les associations cultuelles, permettent de se prémunir d’un certain nombre de dangers. Nous espérons que ces relations soient encore renforcées avec le Forum de l’islam de France (Forif), lancé au début de l’année 2022, dont l’un des quatre groupes de travail concerne précisément les actes antimusulmans et la sécurisation des lieux de culte.


Un autre et dernier chantier, plus fondamental encore, et pour lequel les acteurs du culte musulman doivent employer tous leurs efforts, est celui de l’éducation et de la connaissance.


La CNCDH l’a saisi en émettant de nombreuses préconisations, fort judicieuses, en matière de sensibilisation, de formation et d’accompagnement, qui ne touchent pas encore suffisamment les fidèles de tous les cultes.


Dans cette idée, j’ai créé l’Observatoire des droits de la Grande Mosquée de Paris qui a pour but, outre de saisir la justice pour certains cas, de diffuser une information juridique permettant de comprendre le libre exercice de la pratique religieuse dans le respect de la loi, ainsi que de connaître ce que dit le droit dans le domaine des discriminations.


J’ai également signé un partenariat entre la Licra et la Grande Mosquée de Paris pour agir contre toute forme de racisme, et nous travaillons en ce moment sur la conception d’un outil pédagogique commun.


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Chers membres de la Commission,


Au même chapitre de l’éducation et de la connaissance, je souhaite pour finir et en toute humilité attirer votre attention sur un défi majeur, à l’intersection de toutes mes actions et de tous mes engagements, mais qui demeure peu compris et peu entendu.


Je veux parler de l’éducation et de la connaissance de l’islam.


Je sais que la Commission promeut l’éduction du fait religieux dans nos établissements scolaires. C’est indispensable, mais ce n’est pas suffisant.


Il faut d’abord comprendre que beaucoup de nos concitoyens musulmans ne connaissent pas bien leur religion, quand bien même ils s’en réclament et la pratiquent.


C’est encore plus vrai pour nos jeunes. Ils se tournent vers l’islam sans une éducation religieuse de qualité, ancrée dans notre société, alors même qu’ils peinent parfois à s’accepter en tant que Français de confession musulmane et à composer avec ces deux éléments de leur identité.


Pour cette jeunesse, pour les musulmans, pour tous nos concitoyens qui s’interrogent ou s’alarment, il est essentiel de tracer les voies de l’harmonie entre l’islam, les principes de la République et les valeurs de notre pays.


La Grande Mosquée de Paris s’efforce au quotidien de renouveler, de consolider et de diffuser un discours axé sur les principes islamiques fondamentaux de bienveillance, d’ouverture, de fraternité et de paix, y compris et surtout à l’adresse des autres religions, avec la volonté de démontrer que ces principes convergent avec ceux qui fondent notre communauté nationale.


Il s’agit, plus en détail encore, de procéder à la déconstruction en profondeur des discours haineux, complotistes, victimaires et séparatistes, en particulier de l’islamisme, qui fracturent la société française, et de reconstruire un discours sur l’adéquation entre l’appartenance française et l’appartenance religieuse, sur la participation à la vie citoyenne. C’est ainsi que la citoyenneté, la liberté de conscience, la laïcité, la tolérance et la fraternité pour l’autre croyant et pour le non-croyant, l’égalité homme-femme, le rejet de toute discrimination ou encore la liberté d’expression, seront des notions de la pensée religieuse.


J’ai appelé ce travail « l’adaptation du discours religieux aux réalités et aux particularités de la société française ».


Il représente, encore une fois, un défi national, qui ne peut être relevé sans le concourt de nos institutions et de nos élites.

*


À ce titre, pour finir et si le temps qui m’est imparti n’est pas écoulé, j’aimerais revenir sur une affaire récente, dont vous avez sans doute eu connaissance, et qui symbolise justement cette réflexion nécessaire sur la construction d’un discours pouvant nous mettre à l’abri des discriminations et des incitations à la haine.


Je veux parler de la récente affaire qui m’a opposé à Michel Houellebecq.


Le 28 décembre 2022, j’ai annoncé par communiqué de presse l’intention de la Grande Mosquée de Paris de déposer plainte contre Michel Houellebecq pour certains de ses propos publiés au début du mois dans la revue Front Populaire.


Il y affirmait notamment, je cite, que « le souhait de la population française de souche, (...) ce n’est pas que les musulmans s’assimilent, mais qu’ils cessent de les voler et de les agresser ».


On m’a immédiatement reproché de vouloir museler un écrivain, certains disant que ma démarche contrevenait à la liberté d’expression.


La loi sur la liberté de la presse connaît pourtant certaines limites dont l’incitation à la haine. La Cour européenne des droits de l'homme émet aussi la limite de la responsabilité quant à l'effet d’un propos. Or je considérais que les propos de Michel Houellebecq transgressaient ces limites.


On m’a donné comme intention de vouloir empêcher la critique de l’islam. La critique de la religion est saine et bienvenue, mais les propos en question n’étaient pas du tout de cette nature.


J’en ai donc appelé à la justice, ce qui est un recours noble et exemplaire.


Ma démarche était pédagogique : elle disait à chacun que, lorsque mes droits sont bafoués, l’un des réflexes en tant que citoyen est de pouvoir saisir la justice. Ce droit fondamental ne saurait être dénié à nos concitoyens musulmans : le mettre en avant, c’est mettre en avant l’idée que la République protège à égalité tous ses enfants.


Certains m’ont encore accusé de soutenir une « indignation communautariste », alors que cette indignation n’était pas le fait d’une communauté et que l’action en justice, par ailleurs, est une action universelle devant un juge indépendant et impartial.


Mon intention de déposer plainte était aussi et surtout une volonté de pointer du doigt la désinhibition et la libération de nouvelles formes de discours racistes, qu’on laisse se diffuser passivement : la preuve en est, il a fallu attendre la plainte de la Grande Mosquée de Paris pour mettre en lumière les propos problématiques de Michel Houellebecq.


À travers cette action, je voulais enfin sensibiliser notre société et nos élites sur les confusions et les amalgames en vogue, en leur disant que le fait d’essentialiser, de ne pas faire la distinction entre la majorité des musulmans qui s’intègrent à la République et les islamistes, est très grave pour notre avenir commun.


C’est le message que j’ai transmis à Michel Houellebecq lorsque je l’ai rencontré une semaine plus tard. Je lui ai dit que j’aurais aimé l’avoir comme allié contre les extrémismes qui affaiblissent notre pays.


Lors de notre entrevue, Michel Houellebecq m’a exprimé des regrets face à cette situation et a reconnu que les propos en question étaient de nature à essentialiser sans nuance les musulmans et à les opposer à la « population française de souche », selon l’expression qu’il avait utilisée.


J’ai décidé de renoncer aux poursuites judiciaires à son encontre, montrant que la Grande Mosquée de Paris restera, chaque fois que nécessaire, à l’avant-poste de la lutte contre les discours de haine, mais qu’elle incitera aussi et toujours à la recherche de l’apaisement et du dialogue, dont nous avons tant besoin, sur les bases convergentes des valeurs de notre pays et de l’éthique fondamentale de la religion qui est la mienne et celle d’une partie des Français.


Chems-eddine Hafiz

Recteur de la Grande Mosquée de Paris


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