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Notre mosquée (n°40) - Prière de l’Aïd el-Adha, une foi paisible au cœur de la France [rétrospective 2025]

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Paru le 11 juin 2025


Le Maréchal Lyautey disait : « Quand s'érigera le minaret que vous allez construire, il ne montera vers le beau ciel de l'Île-de-France, qu'une prière de plus dont les tours catholiques de Notre-Dame ne seront point jalouses. » En une phrase, il exprimait déjà la conscience d'une vérité essentielle et affirmait que l'islam en France n'est ni un corps étranger, ni une menace, mais une réalité historique, spirituelle et humaine, qui a toute sa place dans la République. Cette parole d’un homme d’État, témoin de son temps et acteur de notre mémoire collective, devrait résonner dans l’esprit de tous ceux qui prétendent aujourd’hui exclure les musulmans du récit national.


Ce sont les bâtisseurs de la IIIe République, hommes politiques républicains sincères et défenseurs éclairés de la laïcité, qui ont souhaité offrir un lieu de culte digne aux soldats musulmans tombés pour la France. C’est ainsi qu’est née la Grande Mosquée de Paris, symbole de reconnaissance, de respect et de paix. Et c’est dans ce même esprit qu’elle continue aujourd’hui d’accueillir les croyants dans le respect des valeurs républicaines.


Ce vendredi 6 juin 2025, des milliers de fidèles se sont réunis à la Grande Mosquée de Paris pour accomplir la prière de l’Aïd El-Adh’ha. Deux prières ont été organisées, à 7h30 et 8h15, pour permettre un accueil digne, ordonné et serein de tous les fidèles. Les hommes ont occupé la salle de prière principale, le patio et les deux grands jardins, tandis que les femmes ont été accueillies, en plus de leur salle habituelle, dans le Jardin d’Éden et dans la salle de conférence Émir Abdelkader. La séparation entre les deux prières a été assurée dans la tranquillité sans le moindre incident.


Le Recteur Chems-eddine Hafiz, était présent, aux côtés de plusieurs personnalités diplomatiques : les ambassadeurs d’Arabie Saoudite, d’Égypte, d’Oman et du Tchad, ainsi que du chargé d’affaires de l’ambassade d’Algérie en France. Un moment de recueillement, de foi, mais aussi de fraternité. En ces temps où les musulmans de France subissent de nombreuses attaques, cette célébration a été un rappel de la dignité, du calme et de l’attachement profond des fidèles à leur pays.


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Car il faut le dire avec force, toutes les personnes présentes ce matin-là ne venaient que pour prier. Ni pour troubler l’ordre public, ni pour revendiquer quoi que ce soit d’autre que leur droit de vivre leur foi dans la paix. Tous étaient là pour accomplir un devoir religieux, avant de rentrer chez eux ou de regagner leur travail. La prière a été organisée avant les heures habituelles de début de journée, afin de ne gêner personne.


Dans un contexte tendu, cette scène paisible, digne, profondément républicaine devrait être montrée, racontée, répétée. Surtout lorsque la progression de l’islamophobie devient à ce point alarmante. Nous ne pouvons pas nous taire quand, tout récemment, Aboubakar Cissé, un jeune homme de 18 ans, a été tué dans une mosquée dans le Gard en pleine prosternation. Nous ne pouvons pas rester silencieux quand, samedi dernier dans le Var, un tunisien de 46 ans a été assassiné par un individu, qui s’adonnait à la diffusion de vidéos à caractère raciste sur les réseaux sociaux. Deux meurtres qui ne sont pas isolés, mais qui s’inscrivent dans un climat haineux, où l’amalgame devient la norme, et où l’on diabolise tout un pan de la population.


Ces crimes et d’autres ne sont pas des faits divers. Ils sont les conséquences d’un discours public empoisonné, stigmatisant de manière continue l’islam et les musulmans, et aussi d’un silence complice de ceux qui prétendent défendre les valeurs de la République, mais qui  tolèrent que l’on insulte, que l’on exclue, que l’on désigne l’autre, comme l’ennemi.


C’est pourquoi il est temps de prendre la parole avec détermination, non pas avec violence ou colère, mais avec vérité, fermeté et clarté. Ce sont ceux qui traînent sans relâche les musulmans dans la boue qui portent atteinte à la République. Ce sont eux qui bafouent ses valeurs. Et ce sont eux qui n’ont aucune leçon à donner à ceux qui, chaque jour, respectent les lois, travaillent, prient, élèvent leurs enfants et participent à la vie de ce pays avec loyauté.


L’Aïd célébré à la Grande Mosquée de Paris est une illustration lumineuse de cette citoyenneté fidèle et paisible. À nous désormais de faire entendre notre récit, notre vérité, et notre engagement. Pour la majorité des musulmans présents en France, nous affirmons que nous sommes des citoyens français. Point final.


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*Article paru dans le n°69 de notre magazine Iqra.




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