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Focus sur une actualité (n°30) - Le silence des tirailleurs : quand les médias oublient l'histoire

Dernière mise à jour : 16 nov.


En ce 11 novembre, tandis que le pays se recueille pour honorer ses morts, un malaise sourd se glisse entre les discours officiels et les récits médiatiques. Une part essentielle de notre histoire semble s’éteindre dans un silence complice : celui des tirailleurs musulmans, ces soldats venus d'Afrique du Nord et d'Afrique subsaharienne, arrachés à leur terre pour défendre une France qu'ils avaient à peine connue. Jadis salués pour leur courage et leur sacrifice, ils tombent aujourd'hui dans un oubli collectif qui révèle une indifférence profondément choquante. Dans le tumulte de l'actualité, la mémoire de ces combattants disparaît sous une chape d'amnésie médiatique. Et cet oubli n'est pas seulement une omission ; il est le symptôme d'une mémoire nationale qui se fragmente et se recroqueville.


Les médias, jadis ardents défenseur de la mémoire de ces hommes, semblent aujourd’hui plus préoccupés par les récits consensuels, par les hommages généraux, par un discours qui refuse de déranger. Il fut un temps, pourtant, où l’on s’inclinait devant le courage des tirailleurs. Des cérémonies à la Grande Mosquée de Paris, des reportages, des tribunes rappelaient leur place cruciale dans nos rangs. Mais aujourd’hui, alors que les cérémonies se multiplient, où sont les témoignages de leurs descendants, les récits qui raniment ces vies fauchées dans les tranchées ? Où sont ces visages d’hommes disparus pour une France dont ils partageaient à peine la langue, mais dont ils en épousaient les idéaux ?


Le silence médiatique autour des tirailleurs musulmans, cette année, résonne comme un écho de déni. Peut-être est-ce là une crainte diffuse de faire surgir des questions complexes, de rappeler cette France plurielle, bâtie aussi sur les sacrifices de ceux venus d’au-delà de la Méditerranée. Peut-être est-ce plus simplement l’abandon d’une mémoire gênante, une mémoire qui trouble les certitudes, qui nous contraint à reconnaître cette dette de sang que nous devons à ceux que nous n’avons jamais su intégrer pleinement.


La presse et les médias, pourtant, ont une mission sacrée, celle de préserver la vérité, de transmettre l’histoire dans toute sa complexité. En reléguant ces tirailleurs à une zone d’ombre, les rédactions trahissent leur responsabilité et abandonnent une mémoire qui appartient à tous les Français. Il ne s'agit pas seulement de célébrer les batailles victorieuses, mais de rappeler que cette nation fut aussi forgée par le courage d'hommes venus de loin, qui ont partagé notre sort, qui ont porté le poids de notre liberté.


La mémoire nationale est un trésor fragile, que nous risquons de perdre si nous la réduisons à des fragments confortables. Oui, l’oubli des tirailleurs est un scandale. Et si les médias continuent de détourner le regard, c'est notre histoire collective qui se désintègre, qui s’éloigne de cette vérité partagée où les sacrifices de tous trouvent enfin leur place. Rendons-leur justice. Ranimons ces mémoires, non par un devoir formel, mais par une exigence de vérité. C'est seulement ainsi que nous pourrons, dignement, dire : « Non ! Nous n'avons rien oublié. »



*Article paru dans le n°39 de notre magazine Iqra.



 

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