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Sabil al-Iman (n°67) - Foi debout dans un monde assis



Je suis né ici deux fois : une fois par la chair, une fois par le choix.

Mon acte de naissance dit “France”, mon cœur dit “foi”.

On m’a appris la Marseillaise, j’ai appris Al-Fatiha.

J’ai deux héritages, deux livres, deux silences.

Et dans les deux, je cherche la justice, pas la vengeance.

 

À ceux qui me demandent de choisir,

Je réponds : pourquoi trahir pour vous plaire ?

Je suis français sans fierté coloniale,

Et musulman sans honte ni clandestinité.

 

Non, je ne m’excuse pas.

Je ne m’excuse pas d’être français.

Je ne m’excuse pas d’être musulman.

Je ne m’excuse pas d’être intégré à cette République

Qui parfois me rejette quand je l’embrasse trop fort.


JE NE M'EXCUSE PAS D'ÊTRE FRANÇAIS


« Je suis un arbre aux racines profondes. Ce n’est pas parce que ma sève vient d’ailleurs que je ne pousse pas ici. »


Je suis né dans cette langue. J’ai grandi dans ses rues, dans ses écoles, dans ses rêves et ses contradictions. Mon grand-père a combattu sous le drapeau tricolore. Mon père a posé les briques des HLM que vous habitez aujourd’hui.

 

Je suis français. Pas par accident. Par vécu. Par mémoire. Par amour blessé. Pourquoi me demande-t-on de m’excuser d’une nationalité que je n’ai pas volée ? Est-ce parce que je n’ai pas changé mon prénom ? Parce que je jeûne en juin ? Parce que je parle arabe à ma mère ?

 

La France est une terre de pluralité. Ce n’est pas un moule. Mon passeport ne fond pas à la chaleur de la foi. Et ma loyauté ne dépend pas de ma discrétion. « Je suis né ici. J’ai été éduqué ici. J’ai pleuré ici. J’ai prié ici. Et j’ai espéré ici. » Alors non, je ne m’excuse pas.


JE NE M'EXCUSE PAS D'ÊTRE MUSULMAN


« Ma foi n’est pas un drapeau, c’est un miroir. »


Certains veulent que je baisse les yeux quand je parle d’Allah. Que je cache mes ablutions. Que je m’excuse de ne pas manger comme eux. Mais je ne suis pas un clandestin de la spiritualité.

 

Ma foi m’enseigne la paix :

« Le musulman, c’est celui dont les gens sont à l’abri de sa langue et de sa main. »

 

Elle m’enseigne la justice :

« Allah ordonne la justice et la bienfaisance. »

 

Je suis musulman. Pas par provocation, pas par repli. Par foi. Par amour. Par cohérence. Et je n’ai pas besoin de l’autorisation de la République pour prier le Créateur du monde.



JE NE M'EXCUSE PAS D'ÊTRE INTÉGRÉ À LA RÉPUBLIQUE


« Intégré, oui. Dissous, non. »


L’intégration, ce n’est pas la disparition. C’est la participation, sans reniement. Je parle français. Je respecte les lois. Je vote. Je travaille. J’élève mes enfants dans le respect des règles et des valeurs.


Mais je refuse cette nouvelle injonction : “Sois invisible pour être accepté.” On ne m’intègre pas en m’effaçant. Je suis ce que la République prétend vouloir : un citoyen croyant, paisible, loyal.


Le Coran m’a appris cela mieux que bien des manuels :

« Nulle contrainte en religion. »

« Le plus noble d’entre vous, c’est le plus pieux. »

 

Et la République dit, elle aussi : liberté, égalité, fraternité. Je prends ces deux chemins - Coran et République - comme deux rivières qui m’abreuvent.


JE NE SUIS PAS CE QUE VOUS DITES DE MOI


« Ce que vous appelez infiltration est souvent simplement inspiration. »


Ils ont écrit un rapport. Ils ont construit un soupçon. Ils ont lu nos barbes, nos voiles, nos mosquées comme s’ils lisaient des menaces. Mais ils n’ont pas vu nos larmes, nos silences, nos efforts, notre paix. Je ne suis pas un Frère masqué. Je suis un frère blessé. Je ne cherche pas le pouvoir. Je cherche le pardon. Je ne prépare pas une conquête. Je prépare le dîner de mes enfants.

 

On nous observe comme s’il fallait choisir entre islam et République. Mais ce choix est un piège. Une fracture artificielle. Je suis fidèle aux deux : — à Allah pour mon âme, — à la République pour mon cadre. Et je vous le dis calmement : je ne m’excuse pas.

 

Enfin : je suis français sans faire semblant. Musulman sans m’excuser. Intégré sans disparaître.

 

Je suis l’enfant d’un pays qui m’a élevé à moitié,

Et d’un Livre qui m’a élevé jusqu’au ciel.

 

Quand je tends les mains, ce n’est pas pour voter :

C’est pour invoquer Celui qui m’a tout donné.

 

Je ne suis ni un agent, ni un pion, ni un masque.

Je suis un cœur qui bat entre deux fidélités.

 

Je ne m’excuse pas.

Parce que ma foi est lumière,

Et ma citoyenneté, sincère.

 

Laissez-moi croire et bâtir,

Sans me faire craindre ni fuir.

 

Parce qu’Allah Akbar n’est pas une menace,

C’est une espérance.

 

Et la France que j’aime…

Est celle qui n’a pas peur de mon existence.



*Article paru dans le n°67 de notre magazine Iqra.



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