top of page

Lumière et lieux saints de l'Islam, à la découverte des mosquées du monde (n°67) - Masjid Jamek de Kuala Lumpur


À l’endroit où les deux rivières : Klang et Gombak mêlent leurs eaux comme deux prières murmurées à l’aube, s’élève Masjid Jamek, la vieille dame blanche au cœur de Kuala Lumpur. Elle ne parle pas. Elle écoute. Elle n’impose pas. Elle accueille.


Comme un poème ancien perdu dans le tumulte moderne, la mosquée Jamek ne cherche pas à être admirée : elle attend qu’on la comprenne. Son marbre, rayé de rouge et d’ivoire, n’est pas là pour frapper l’œil mais pour apaiser le cœur. Ce lieu, construit sur la première terre des morts malais, est un silence dressé. Un silence qui prie.


Là où la ville a été enfantée


Avant les tours d’acier et les vitrines de verre, il y eut cette jonction de rivières. Là, dans la moiteur de la forêt, des mains d’hommes simples ont dessiné les premières lignes d’un village. Et plus tard, un homme venu d’Occident, Arthur Benison Hubback, a écouté les bruits de la jungle, les soupirs du peuple, et a dessiné une maison pour Dieu.



Il ne sculpta pas une forteresse, mais un souffle. Il tissa les songes de l’Inde moghole, les courbes de l’Espagne andalouse, et les battements du cœur malais. Ainsi naquit Masjid Jamek, comme une mélodie lente, tissée de lumière et de discipline.


Ici, les dômes ne dominent pas, ils s’inclinent. Les minarets ne s’élèvent pas vers le ciel, ils le désignent.


L’architecture comme acte de foi


Le marbre, les arches, les colonnes, les dômes, tout est fait non pour montrer, mais pour faire ressentir. Le fidèle qui entre ne foule pas un sol, il entre dans un souffle. Chaque mihrab semble chuchoter : Allahu Akbar. Chaque motif floral, tracé par des mains anonymes, rappelle le jardin promis, celui qu’on nomme Jannah.


Le vendredi, les ruelles voisines se serrent, les échoppes se taisent, les visages se tournent vers la mosquée. Les corps pressés vers elle forment une vague, non de foule, mais de foi. Ceux qui n’ont pas de place dans les rangs s’installent sur les trottoirs, entre les racines des arbres, sous les ponts : tout Kuala Lumpur devient mosquée.



Un lieu où l’âme retrouve sa voix


À Masjid Jamek, l’islam n’est pas une identité, c’est une respiration. Une manière de regarder le monde : non pour le dominer, mais pour s’y incliner. On y croise des étudiants, des mères silencieuses, des voyageurs, des vendeurs de fruits, et même des non-musulmans, invités à voir, à sentir, à comprendre.


Des brochures sont offertes dans toutes les langues. Des regards sont échangés sans jugement. Ici, Dieu n’est pas une injonction, mais une présence. La foi, non un drapeau, mais une eau souterraine.


Masjid Jamek n’est pas un monument, c’est une mémoire qui marche


Chaque vendredi, les générations y déposent leurs soupirs et leurs espoirs. Chaque matin, les premières lueurs du jour viennent lécher ses dômes. Et chaque soir, les rivières fredonnent à son seuil une berceuse que seuls les cœurs purs entendent.


“Dans le tumulte des métropoles, il faut un arbre. Dans le vacarme des hommes, il faut un chant. Dans la vie pressée, il faut une mosquée.”

A. Samad Said




*article paru dans le n°72 de notre magazine Iqra.



                         

 

À LIRE AUSSI :


Comments


bottom of page