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Le Hadith de la semaine (n°58) - De la miséricorde prophétique universelle au devoir de la communauté responsable



D'après Abou Hourayrah, qu'Allah l'agrée, il a été dit : « Ô Messager d'Allah, invoque contre les polythéistes. » Il répondit : « Je n'ai pas été envoyé pour maudire, mais pour être une miséricorde. » [Rapporté par Muslim]


Si dans le passé nous avions besoin de ce hadith, nous en avons aujourd'hui un besoin encore plus pressant, pour le préserver, le comprendre et agir en conformité avec lui. En effet, nous vivons dans un monde en perpétuel changement, où les concepts se mêlent et les positions se croisent, ce qui nous pousse à retourner à notre essence pure, au comportement de notre Prophète (paix et bénédictions sur lui), afin d'en tirer la meilleure manière de demeurer fermes dans notre foi, de pratiquer la miséricorde dans nos comportements et de prendre pleinement conscience des défis de notre époque et des dimensions de la société à laquelle nous appartenons. Ainsi, dans des sociétés aux croyances et cultures diverses, la conscience du musulman est mise à l'épreuve par sa capacité à accepter l'autre, sans perdre son âme ni son identité.


La situation actuelle en France est plus complexe encore, où les défis sont plus prononcés et évidents. En effet, les convictions religieuses et non religieuses se croisent avec la nécessité du vivre ensemble, en particulier dans un contexte où le dialogue est impératif, tout en restant fidèle à nos principes. Cela constitue une démarche logique, reconnue et suivie par toutes les orientations religieuses et non religieuses.


La mort d'une grande personnalité religieuse, comme le pape,est en France un véritable test pour chaque musulman : il ne sera pas seulement interrogé sur ses sentiments, mais aussi sur ses valeurs, sur la sincérité de sa représentation du Message de son Prophète (paix et bénédictions d'Allah soient sur lui), de celui qu'Allah a décrit en disant : « Et nous ne t’avons envoyé [Mohamed] que comme une miséricorde pour l’univers. » [El-Anbiyaa :107]. La miséricorde ici n’est pas un simple slogan, mais un comportement vivant, pratiqué envers le proche et le lointain, avec ceux qui partagent l'avis et ceux qui s'y opposent.


Lorsque les compagnons demandèrent au Prophète (paix et bénédictions sur lui) d’invoquer contre les polythéistes qui l’avaient persécuté et chassé, sa réponse fut un éclair qui traversa la colère : « Je n’ai pas été envoyé pour maudire, mais pour être une miséricorde. » Par ces mots, notre Prophète (paix et bénédictions sur lui) a défini les limites de la mission, et nous a tracé le chemin : l’appel à la foi, non la moquerie ; la guidance, non la perdition ; porter des valeurs, et non pasprononcer des jugements.

 

À la lumière de cette compréhension, le musulman doit aborder les douleurs humaines, quelles que soient leur origine, non depuis une position d’adversité, mais en témoignage de la vérité d'Allah : « Et ainsi, Nous avons fait de vous une communauté juste, afin que vous soyez témoins sur les peuples. » (Al-Baqara :143). Notre témoignage n’est ni arrogance ni effacement ; c’est une responsabilité dans le discours, une justice dans les actes, et une miséricorde qui se propage là où elle est la plus nécessaire.


La réalité française, par sa complexité et sa sensibilité, ne laisse pas de place aux réactions impulsives. C’est pourquoi le musulman doit agir avec discernement et savoir peser chaque mot et chaque action à la lumière de la législation islamique et de l’intérêt légitime qui prend en compte les principes immuables, sans ignorer les changements de circonstances et de temps.


Lorsqu’un musulman présente ses condoléances ou exprime des sentiments humains nobles, cela ne signifie pas qu’il renonce à sa foi, mais qu’il incarne le caractère de son Prophète, que la prière d'Allah et Son salut soient sur lui, qui a dit : « Le raffinement ne peut qu’embellir toute chose, et il ne peut être retiré de rien sans l’abaisser. » [Rapporté par Muslim]. Le véritable musulman ne se réjouit pas de la douleur d’autrui, et ne tombe pas dans l’exagération des flatteries, mais adopte une position qui convient à la miséricorde avec laquelle le Prophète (paix et bénédictions sur lui) a été envoyé. La législation islamique n’est pas venue pour suspendre les intérêts, mais pour les réaliser et les parfaire, et n’est pas venue seulement pour diminuer les méfaits, mais pour les repousser autant que possible. Ainsi, les actions dans de telles situations doivent être pesées selon les objectifs législatifs, et non en fonction de la passion ou de l’émotion passagère. Une parole peut être un pont qui ouvre des cœurs, ou un mur qui les ferme.


Imiter le Prophète (paix et bénédictions sur lui) signifie savoir se comporter lorsque les gens sont perturbés, en alliant sincérité d’appartenance et douceur dans les interactions, à la lumière du verset sacré : « Repousse [le mal] par ce qui est mieux, et voilà que celui qui était ton ennemi ardent devient alors un ami chaleureux. » [Sourate Fusillât :34].


Aujourd’hui, plus que jamais, c’est de ce musulman que la communauté a besoin : fermement enraciné, avec des attitudesexcellentes, pesant ses paroles et ses actes avec la balance de la législation islamique et de la raison, ne se laissant pas séduire par les louanges ni provoquer par les injures, suivantpatiemment la voie de son Prophète lorsque le chemin devient incertain.


Il n’échappe à aucun esprit lucide qu’il n’est pas facile de rester fidèle aux valeurs de la miséricorde dans un monde qui nous pousse à y renoncer. Il n’est pas facile de préserver la pureté du cœur quand ceux qui l’entourent se hâtent de fomenter, de calomnier, et de dessiner des images déformées de sa religion et de son identité. Cependant, le véritable musulman reste fidèle à l’alliance : il ne laisse pas tomber son message sous le poids des défis, et ne perd pas de vue son Prophète qui lui a été envoyé comme une miséricorde pour les univers. Et pourtant, même face à la réapparition de l'islamophobie et des discours haineux et racistes, nos positions doivent être l'incarnation pratique et morale du Message de notre Prophète (paix et bénédictions sur lui) : une miséricorde consciente, non de la naïveté ; un témoignage juste, non de la dissolution ; la dignité dans la fermeté, et la douceur dans les rapports.


Ainsi, nous réaffirmons que nous faisons partie de cet espace humain, nous respectons les douleurs humaines, et construisons des ponts sans abandonner notre identité.


C’est aujourd’hui le véritable examen : être des messagers de miséricorde dans un monde blessé, planter la bonne parole dans un sol stérile, et montrer que le véritable musulman ne devient que plus pur par les épreuves, et que la haine ne fait qu’augmenter son attachement à la noblesse et à la grandeur.


Que nul ne pense que tout cela relève simplement d’une position sociale ou politique ; c’est avant tout une fidélité à l’appel de Mohamed (paix et bénédictions sur lui), qui n’a pas été envoyé pour maudire, mais pour être une miséricorde pour les mondes.



*Article paru dans le n°63 de notre magazine Iqra.

 


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