Lumière et lieux saints de l'Islam, à la découverte des mosquées du monde (n°68) - La Mosquée Heydar de Bakou
- Guillaume Sauloup
- il y a 5 jours
- 8 min de lecture

Dans la clarté d’un monde mouvant, voici qu’aux rives de la Caspienne, un sanctuaire surgit, tel un mihrab céleste dressé vers l’éternité : la mosquée Heydar, joyau lumineux de Bakou, incarne à la fois la grandeur du culte et la noblesse de l’âme azérie.
Une naissance bénie sous l’ombre du Nom
C’est en l’an 1435 de l’Hégire, correspondant à 2014 de l’ère chrétienne, qu’a été achevé ce temple d’élévation et de paix. L’ordre en fut donné en 2012 par le président Ilham Aliyev, qu’Allah l’assiste dans ses responsabilités, fils du défunt Heydar Aliyev, à qui le monument est dédié. L’intention, bien au-delà de la pierre et du marbre, fut de graver dans la chair d’Azerbaïdjan un témoignage vivant de fidélité à la foi et à la patrie.
Le 26 décembre 2014, au cœur d’un hiver azéri, la mosquée fut inaugurée en présence d’autorités religieuses musulmanes, chrétiennes et juives. Ce fut là plus qu’un événement : un signe. Un souffle. Une annonce de fraternité dans le respect des différences. Car ce lieu sacré n’est pas une citadelle d’exclusion, mais un havre de tolérance et un phare de cohabitation pacifique.
L’architecture comme invocation
Dressée sur une superficie de 12 000 m², la mosquée Heydar resplendit telle une sourate de pierre offerte aux passants. Quatre minarets, tels des doigts levés vers les cieux, s’élèvent à 95 mètres, dans une rigueur presque mystique. Deux coupoles dominent l’édifice : la grande de 55 mètres et la plus petite de 33, dans un jeu d’harmonie géométrique qui rappelle la balance entre la Majesté (Jalal) et la Beauté (Jamal) dans les Noms divins.


Le style architectural emprunte au Shirvan-Absheron, forme locale d’un art islamique ancien, raffiné et sobre, enraciné dans la terre et les songes du peuple d’Azerbaïdjan. Le revêtement extérieur, taillé dans la pierre traditionnelle des souverains Shirvanshahs, épouse la lumière d’une manière presque coranique. À l’intérieur, marbre et bois dialoguent en silence, et sur les parois des dômes, les versets du Qur’ân se déploient comme des ailes de lumière.
Et que dire de la prière déroulée sur des tapis étendus comme des jardins ? Sur 920 mètres carrés, les fidèles foulent une réplique de l’illustre tapis de Sheikh Safi, aujourd’hui conservé au Victoria and Albert Museum de Londres. Chaque fibre y est louange, chaque motif une prière silencieuse.
Un lieu de culte… et de message
Mais la mosquée Heydar ne se contente pas d’être belle. Elle est message. Elle est miroir. Elle est parole. À l’image du Prophète bien-aimé ﷺ qui accueillait les délégations dans sa mosquée de Médine, ce lieu aspire à être un centre d’unité dans un monde morcelé.
Dans son discours d’inauguration, Ilham Aliyev déclara : « Ce sanctuaire porte le nom d’un homme grand : Heydar Aliyev, serviteur dévoué de l’Azerbaïdjan, artisan de sa modernité et protecteur de ses valeurs spirituelles. Il a montré que la fidélité à nos traditions religieuses peut aller de pair avec l’édification d’un État fort et respecté. »

Ce fut sous la conduite de cet homme que plus de 500 mosquées furent édifiées à travers le pays. Non comme de simples bâtiments, mais comme des lieux de réconciliation entre la foi et la cité, entre l’histoire et le devenir.
Un minaret dans le désert du monde
Dans le tumulte des nations et l’épreuve des civilisations, la mosquée Heydar surgit comme un appel. Elle n’est pas seulement un lieu de prosternation, elle est un témoin : celui de la capacité d’un peuple à faire de la religion un levier d’unité plutôt qu’un fossé, à inscrire la transcendance dans la modernité sans renier l’une ni l’autre.
Érigée dans le silence altier de la prière, ouverte à toutes les âmes sincères, la mosquée Heydar est devenue, en peu de temps, un symbole de paix, de tolérance et de lumière. Que les pas qui y entrent en ressortent purifiés, et que l’appel du muezzin qui y résonne continue, jusqu’au Jour du Jugement, de vibrer comme une promesse de miséricorde.

*article paru dans le n°73 de notre magazine Iqra.
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