top of page

Lumière et lieux saints de l'Islam, à la découverte des mosquées du monde (n°76) - Les mosquées des Comores

ree

Par Noa Ory

Aux Comores, l’islam n’a pas seulement bâti des lieux de culte : il a façonné des paysages. À Moroni, la capitale, les mosquées se succèdent le long de la baie des boutres comme un collier de nacre posé au bord de l’océan. Sur près d’un kilomètre de rivage, une dizaine de petites mosquées, toutes blanchies à la chaux, dressent leurs minarets discrets vers le ciel. Elles portent des noms anciens, hérités de lignées, de légendes ou de prières.


La plus célèbre d’entre elles, la mosquée du Vendredi, incarne l’âme arabo-islamique de la ville. Achevée un vendredi 13 du mois de Joumada al-Akhir en l’an 830 de l’Hégire, soit en 1427 de l’ère chrétienne, elle fut jadis appelée mosquée des gens des Comores. Son histoire est celle d’un exil fécond : celle des Nyama Hatwibu, famille de prédicateurs venus de Mazwini, un bourg du sud-est de Ngazidja détruit à la fin du XIVᵉ siècle. Ces réfugiés firent de leur déracinement un acte de foi : reconstruire sur la côte un sanctuaire pour la paix, où la parole divine retrouverait un toit.


ree
ree

Au fil des siècles, la mosquée fut réaménagée, réhabilitée, soignée comme on soigne une mémoire. De l’édifice originel, il subsiste un pan de mur et deux poutres anciennes, sculptées d’inscriptions arabes parmi lesquelles figure le sceau de Salomon, signe mystérieux de sagesse et de protection. Le mihrab, niche ovale tournée vers la Mecque, a été légèrement déplacé, et le minbar, chaire de bois d’où le Khatib prêche le vendredi, porte encore une inscription coranique dorée, rappelant que « la parole d’Allah est la plus haute ».


Le minaret, le mihrab et le minbar de Moroni rappellent ceux d’autres mosquées de l’archipel : celles de Sima et de Domoni, dites des Chiraz, érigées selon les archéologues dès le XIᵉ siècle, dans le sillage de l’islamisation des îles. Les bâtisseurs comoriens s’inspiraient du style chirazien, venu des rivages de Perse et des ports swahilis : structures arrondies, ouvertures en arcs élégants, décor intérieur foisonnant sous des façades volontairement sobres.


ree
ree

À Bangwakuni, la légende ajoute sa part de merveilleux : on dit que la mosquée de Shiunda fut édifiée par les djinns en une seule nuit. À l’aube, les habitants la trouvèrent achevée, blanche et silencieuse, comme tombée du ciel.


Les mosquées comoriennes, humbles et harmonieuses, unissent la grâce de l’art au souffle du sacré. Leurs piliers de bois sculpté, leurs voûtes arrondies et leurs mihrabs incrustés de corail racontent la même histoire : celle d’un archipel de prières, suspendu entre Afrique et Orient, où la foi s’est faite architecture, et l’architecture, louange.


Dans la lumière du couchant, quand l’appel du muezzin glisse sur la mer, Moroni retrouve alors son visage éternel : celui d’une cité de pierre et de silence, où chaque mosquée est un verset gravé dans la mémoire du vent.

 

ree
ree


*article paru dans le n°82 de notre magazine Iqra.



                         

 

À LIRE AUSSI :

  

bottom of page