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Focus sur une actualité (n°76) - COP30 : la promesse d’un monde uni, l’épreuve d’un monde divisé

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Par Noa Ory

À Belém, la COP30 ne ressemble pas à un sommet de plus sur le climat. Avec la forêt amazonienne pour décor et rappel constant, elle expose sans détour un monde qui peine à se regarder en face. Ce qui devait rassembler a fini par dévoiler l’ampleur des lignes de fracture : les écarts d’intérêts, de responsabilités, d’histoires et d’urgence sont désormais criants.


Les pays les plus exposés ne cachent plus leur colère. Ils encaissent tempêtes inédites, sécheresses interminables, mers qui avancent à pas de géant. Ils n’en peuvent plus d’applaudir des discours tandis que les bilans humains, eux, s’alourdissent. Ce qu’ils réclament est clair : des financements fiables, débloqués sans arrière-pensée, qui ne les enferment pas dans une spirale de dettes sous couvert de solidarité.


En face, les nations du Nord prennent la parole, jurent qu’elles ont compris la gravité de l’instant… mais referment vite les portefeuilles dès qu’il s’agit de passer aux actes. Elles promettent la sortie des énergies fossiles, le maintien de la limite des +1,5 °C puis reviennent à leurs impératifs domestiques, à leurs calendriers électoraux, à leurs alliances économiques. Les mots montent haut, mais l’action reste au milieu du gué.


L’édifice multilatéral, lui aussi, donne des signes de fatigue. Certaines grandes puissances négocient à distance, d’autres se replient dans des blocs rivaux. Quant aux peuples autochtones, premiers gardiens de la forêt et premiers touchés par sa destruction, ils doivent encore se battre pour obtenir une place à la table des décisions. La « coopération internationale » paraît toujours bien mise dans les communiqués, mais elle sonne souvent creux dans les salles de discussion.


Au fond, ce qui se joue ici dépasse les graphiques climatiques : c’est la question de la légitimité. Qui défend qui ? Qui parle au nom de quoi ? Et surtout : à qui les plus vulnérables peuvent-ils faire confiance ? Si cette COP 30 ne parvient pas à réduire le décalage entre les promesses des uns et la détresse des autres, elle deviendra un symbole de plus : celui d’une confiance brisée, d’un rendez-vous manqué avec le réel.


L’adaptation n’est plus un concept de rapport onusien : c’est une urgence vitale, qui exige au moins autant de moyens que la réduction des émissions. Les pays du Nord doivent désormais choisir entre continuer à parler ou réellement soutenir. La crédibilité se joue sur les virements, pas sur les estrades.


Belém pourrait être un tournant : le moment où la politique climatique assume enfin sa dimension d’équité, où elle cesse de dissimuler les rapports de force derrière des formules consensuelles. Si cet enjeu est relégué, la conférence laissera un avertissement amer : l’avenir se fracturera selon les richesses, les puissances et les générations et le climat cessera alors d’être un héritage commun pour devenir le privilège de quelques-uns.



*Article paru dans le n°86 de notre magazine Iqra.



 

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