Le Hadith de la semaine (n°67) - Appel prophétique à la persévérance en temps d’exclusion
- Guillaume Sauloup
- 30 juin
- 8 min de lecture
Dernière mise à jour : 1 juil.
D’après Abû Hourayrah رضي الله عنه, le Messager d’Allah ﷺa dit :
« Recherche assidûment ce qui t’est bénéfique, sollicite l’aide d’Allah et ne faiblis point. Et si une épreuve t’atteint, ne dis pas : “ Ah ! Si j’avais fait ceci, il en aurait été autrement”, mais dis plutôt : “C’est la volonté d’Allah, et ce qu’Il a décrété s’est réalisé”, car le mot “si” ouvre la porte aux œuvres du Diable. »
Rapporté par Muslim, n°2664
Par la volonté d’Allah, AWJ, nous nous apprêtons à entamer une nouvelle année de l’Hégire. Tandis que la plupart des gens se contentent de changer de calendrier, rares sont ceux qui entreprennent une révision plus profonde : celle de leur regard sur eux-mêmes, sur leurs valeurs, et sur leur position dans ce monde en mouvement.
Le mois d’Allah, El-Mouharram, ne représente pas une simple entrée symbolique dans l’année. Il est un appel céleste à faire une pause, réfléchir, et redémarrer avec un cœur plus lucide, une conscience plus éveillée, et une vision éclairée par la lumière prophétique.
C’est alors que ce hadith du Prophète ﷺ se dresse devant nous, non comme un simple enseignement récité dans les mosquées, mais comme une exhortation vive, tranchante, qui interroge chacun de nous : Voici un nouveau cycle de ta vie… Qu’en feras-tu ? Vers quoi porteras-tu ton ardeur ? Et vers où orientes-tu ta marche ?
Quand le Prophète ﷺ dit : « Recherche ce qui t’est bénéfique », il ne jette pas une maxime éthérée. Il enracine dans le cœur du croyant une force intérieure, un esprit de vigilance et de discernement, qui le pousse à choisir avec lucidité ce qui est bénéfique, ici-bas comme dans l’au-delà. Il ne s’agit pas simplement d’agir, mais de viser juste. D’orienter son énergie vers un bien réel, durable, agréé par Allah, et non vers un profit illusoire, ou une complaisance éphémère envers un système ou une société qui ne reconnaît ton humanité que si tu t’es défait de ta foi, de ta pudeur, de ta langue et de ta dignité.Jusqu’à, parfois, souhaiter ta disparition pure et simple.
Nombreux sont ceux qui ont confondu l’intérêt avec la compromission.
Ils ont préféré le silence face à la discrimination institutionnelle.
Ils ont reculé devant les politiques de dénudement, maquillées en liberté.
Ils ont enterré leur identité, de peur d’un regard soupçonneux ou d’un mot venimeux.
Et voilà que le hadith nous secoue doucement : Recherche ce qui te fait réellement grandir, non ce qui te rend acceptable aux yeux de ceux qui ne comprennent ni la liberté, ni la fraternité, ni la justice, que ce soit en discours, ou en pratique.
Puis le Prophète ﷺ poursuit : « Et demande l’aide d’Allah ». Comme pour te rappeler que tu n’es pas seul. Que tu n’avances pas à découvert. Que ton Seigneur ne t’abandonnera pas si tu avances vers Lui avec sincérité, et si tu t’armes de patience et de clairvoyance.
Dans un climat tendu où certains font de la « neutralité » un voile commode pour une islamophobie perfide, où l’on cible systématiquement les musulmans dans les médias, les discours politiques et les institutions, cette parole prophétique résonne comme une injonction spirituelle et politique : Appuie-toi sur ton Seigneur. Ne plie pas. Ne mendie pas ton droit d’exister. Ne capitule pas. Ne te laisse pas trainer dans la boue.
Et voici que le Prophète ﷺ assène une vérité capitale : « Ne faiblis point ».
Ne sois pas de ceux qui renoncent à élever leur voix.
Ne sois pas de ceux qui se taisent quand on insulte leur dignité.
Ne sois pas de ceux qui abdiquent devant les lois injustes, ni de ceux qui cèdent leur avenir pour un confort provisoire.
La faiblesse ne vient pas de ton statut de minorité. Elle vient de ton renoncement à penser, à dire, à agir.
La faiblesse ne réside pas dans les insultes des racistes ou les provocations des chroniqueurs. Elle commence quand tu choisis de ne pas répondre avec hauteur, avec savoir, avec vérité.
Quant à ceux qui justifient la haine, qui promeuvent la peur de l’islam et des musulmans, qui nourrissent l’hostilité envers le hijab, la mosquée, la barbe ou l’arabe, tout en chantant l’éloge du « vivre ensemble » sur les plateaux et les affiches, ils ne sont rien d’autre que les porte-voix d’un cynisme dangereux, maquillé en tolérance.
Et le musulman éveillé ne se prêtera jamais à cette mascarade. Il restera, selon la prescription prophétique, fort, digne, et porteur d’un message… jamais complice d’un discours qui l’écrase.
À ce moment précis, il nous appartient de garder à l’esprit que ce calendrier hégirien, que nous saluons chaque année, ne fut pas établi à la naissance ou à la mort du Prophète ﷺ, mais à son émigration. Une émigration qui fut une décision courageuse, douloureuse, risquée, mais nécessaire.
Le Prophète ﷺ n’a pas attendu que la Mecque devienne favorable. Il a évalué la réalité avec lucidité. Il a agi. Il a tracé un chemin. Il s’est doté des moyens. Il a confié son affaire à Allah. Il n’a pas cédé à la paralysie. Et lorsqu’Abû Bakr رضي الله عنه eut peur dans la grotte, il prononça cette phrase éternelle : « Ne t’afflige pas, Allah est avec nous ».
Et nous, aujourd’hui ? Où sont nos plans ? Où est notre vision ? Où est notre projet ?
Attendons-nous que la France devienne subitement terre d’islam sans que nous n’ayons semé, enseigné, élevé, résisté ?
Le Prophète ﷺ conclut ce hadith par une sagesse divine : « Si une épreuve t’atteint, ne dis pas : “Si j’avais fait…” mais dis : “C’est le décret d’Allah et Il a fait ce qu’Il a voulu.” »
Ne t’accroche pas au passé. Ne rumine pas les occasions manquées. Regarde vers l’avant. Accepte le décret divin avec sérénité. Oppose-lui une action réfléchie, ancrée, noble. Et poursuis ton chemin.
Ce hadith n’est donc pas une maxime lointaine à réciter sur les chaires. Il est une stratégie existentielle, un appel à la renaissance, une méthodologie de relèvement.
Chaque nouvelle année hégirienne est une invitation à émigrer intérieurement.
De la plainte à la construction.
De l’illusion à la clarté.
De la soumission au monde à la servitude envers le Seigneur.
Ce nouveau cycle ne se célèbre pas dans l’euphorie vide des vœux, mais dans la lucidité, la planification, la résistance, l’édification.
Et que ceux qui cèdent à la haine, qui camouflent l’éradication sous des mots suaves, qui légitiment l’injustice sous les habits de la République, ceux-là sont les véritables ennemis de la liberté, plus dangereux encore que les extrémistes qui hurlent dans les rues : « L’islam n’est pas le bienvenu ici ! »
Commence donc ton année comme le Prophète ﷺ commença son émigration.
Avec une vision claire.
Une volonté ferme.
Et une foi inébranlable dans la promesse d’Allah.
Car celui qui commence ainsi, Allah ne l’abandonnera jamais…
Même si cela déplaît aux ennemis de la lumière.
*Article paru dans le n°71 de notre magazine Iqra.
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