Le Hadith de la semaine (n°76) - Le musulman et l'autre
- Nassera BENAMRA
- 6 oct.
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Par Cheikh Younes Larbi
D’après « Abd Allah ibn Amr » (qu’Allah l’agrée, lui et son père), le Prophète ﷺ a dit :
« Le musulman est celui dont les autres musulmans sont à l’abri de sa langue et de sa main. Et l’émigrant (el-muhajir) est celui qui délaisse ce que Allah a interdit. »
RAPPORTÉ PAR EL-BUKHARI DANS SON SAHIH (LIVRE DE LA FOI, CHAPITRE : LE MUSULMAN EST CELUI DONT LES MUSULMANS SONT À L’ABRI DE SA LANGUE ET DE SA MAIN, N°10), ET PAR MUSLIM DANS SON SAHIH (LIVRE DE LA FOI, N°40)
Dans une autre version rapportée par En Nassaï et Ahmad : « Le musulman est celui dont les gens sont à l’abri de sa langue et de sa main, et le croyant est celui en qui les gens trouvent sûreté pour leur vie et leurs biens. » La version « musulmans » est la plus authentique et la plus répandue, tandis que celle disant « les gens » est également correcte et élargit le sens pour inclure l’ensemble des hommes.
Notre Bien-Aimé Prophète ﷺ ne cesse de nous enseigner le sens du véritable musulman, celui qui allie la connaissance des préceptes de sa religion à leur mise en pratique, afin d’être un modèle dans sa morale et son comportement. Dans ce hadith sublime, il explique que le musulman parfait est celui qui ne nuit à personne ni par ses paroles ni par ses actes. Il a particulièrement mis en avant la langue et la main, compte tenu de leur pouvoir de causer du tort aux autres.
La langue peut mentir, médire, insulter, témoigner faussement ou blesser les cœurs, tandis que la main peut frapper, voler ou tuer. La priorité donnée à la langue souligne que le tort causé par les paroles est plus fréquent et plus étendu, touchant vivants et morts. Le Prophète ﷺ a dit : « Ne maudissez pas les morts, car ils ont atteint ce qu’ils ont accompli » c’est-à dire qu’ils sont récompensés par Allah pour leurs bonnes ou mauvaises actions. Allah seul juge et accorde le pardon selon Sa sagesse. Ainsi, nul ne peut décider pour autrui de la destinée finale, car cela appartient exclusivement à Celui qui détient la toute puissance. De plus, le Prophète ﷺ a précisé : « Ne maudissez pas les morts, afin de ne pas nuire aux vivants », mettant en évidence que cette interdiction protège également les sentiments des proches et préserve l’harmonie sociale.
Les meilleurs musulmans sont ceux qui s’acquittent pleinement des droits d’Allah dans l’adoration et l’obéissance, et qui s’acquittent aussi des droits d’autrui avec bonté, justice et miséricorde. La religion d’une personne ne peut être complète qu’en réunissant les droits du Tout Puissant et les droits des serviteurs. Celui qui soigne sa relation avec son Seigneur par la prière, le jeûne, le pèlerinage et le rappel d’Allah, mais néglige sa relation avec autrui : parents, épouse, enfants, voisins, proches ou société, voit sa foi et son islam demeurer imparfaits, quels que soient les prétextes ou les excuses invoqués. Car l’islam appelle à une personnalité équilibrée dans toutes les relations, et notre Prophète ﷺ demeure notre modèle en cela.
En évoquant cette relation avec autrui, il convient de l’affirmer et de l’ancrer, notamment vis-à-vis des non-musulmans dans ce contexte occidental. Cela ne signifie nullement un excès de douceur ou de renoncement aux droits. Bien au contraire, l’Islam prône l’équilibre entre miséricorde et justice, entre paix et dignité. Dans la vie quotidienne, l’attitude requise est la bienveillance et la bonne conduite, mais face à l’injustice ou à l’agression, il faut faire montre de fermeté et de défense légitime : la loi prime pour tous. Ainsi, notre méthodologie combine deux dimensions : la miséricorde dans les rapports ordinaires et la fermeté lorsque les droits ou la dignité sont menacés. L’Islam n’est pas un projet fermé ou rigoriste imposant sa force, mais un message élevé plaçant l’homme au centre : vivre en sécurité et traiter autrui avec respect et justice.
Combien notre monde tourmenté, rempli d’injustice, d’humiliation, de marginalisation et de racisme, a besoin de cet esprit : l’esprit de la paix juste, qui n’exclut pas le courage de défendre le droit, qui refuse l’humiliation devant les perfides et qui n’abolit jamais la douceur et la miséricorde dans les rapports humains.
Enfin, le Prophète ﷺ nous rappelle le concept essentiel de la hijra : elle ne se limite pas au déplacement physique d’un lieu à un autre, mais consiste surtout à abandonner ce qu’Allah a interdit. Le véritable musulman est celui qui émigre loin du péché, comme il émigra du polythéisme, réalisant ainsi la signification profonde de la hijra dans son cœur, son comportement et ses actions.
*Article paru dans le n°79 de notre magazine Iqra.
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