Le Hadith de la semaine (n°77) - Si les lumières de la vue s’éteignent en ce monde, elles resplendiront dans l’au-delà
- Guillaume Sauloup
- 15 oct.
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Par Cheikh Younes Larbi
D’après Anas ibn Malik (qu’Allah soit satisfait de lui), le Prophète ﷺ a dit :
« Allah, exalté soit-Il, a dit : Lorsque J’éprouve Mon serviteur en lui retirant ses deux êtres chers, et qu’il endure avec patience, Je lui accorde en compensation le Paradis. (Il désignait par-là, ses yeux.) »
Rapporté par El-Boukhari, Livre des malades, chapitre : Le mérite de celui dont la vue s’en est allée et qui a patienté, n° 5653
Les yeux sont un don sublime, parmi les plus grandes grâces qu’Allah ait accordé à Ses serviteurs. Grâce à eux, l’homme contemple l’existence, trouve sa voie, et lit les signes de son Seigneur dans l’univers et dans la Révélation.
Le Noble Coran évoque à maintes reprises la vue comme une porte vers la guidance et la réflexion. Allah, exalté soit-Il, dit : « Ne lui avons-Nous pas donné deux yeux ? » (Sourate al-Balad, verset 8).
Ainsi, les yeux sont un moyen de discerner le vrai du faux et de goûter à la beauté de la vie. Cependant, il se peut que Allah (AWJ) décide de priver Son serviteur de cette grâce afin de l’éprouver. S’il endure avec patience et accepte le décret divin, la récompense qui l’attend surpasse infiniment ce qu’il a perdu : c’est le Paradis.
Ce hadith qudusi met en lumière la valeur du Sabr, la patience dans l’épreuve, et montre qu’Allah, exalté soit-Il, peut accorder à Son serviteur patient la plus noble des compensations : l’entrée au Paradis. Le Coran affirme en effet : « les patients recevront leur pleine récompense sans compter. » [Sourate Az-Zoumar, verset 10]. Ce hadith en précise l’application à ceux qui ont été éprouvés par la perte de la vue, soulignant ainsi la grandeur de cette bénédiction et la gravité de sa privation.
Il confirme également un principe fondamental : la récompense est à l’image de l’épreuve. De même que le serviteur a été privé de la lumière de la vue en ce monde, celle-ci sera compensée par la lumière du Paradis dans l’au-delà.
La Sunna est venue confirmer que la patience est la clé de tout bien. Le Prophète ﷺ a dit : « Étonnant est le cas du croyant : tout son sort lui est bénéfique. S’il rencontre la prospérité, il remercie et c’est un bien pour lui ; s’il rencontre l’adversité, il patiente et c’est un bien pour lui » (Rapporté par Muslim). L’épreuve n’est donc pas une malédiction, mais un chemin vers l’élévation spirituelle et l’expiation des péchés, lorsqu’elle est accueillie avec patience et confiance en Allah.
Ici émerge une règle fondamentale de la finalité de la Charia : celle-ci a été établie pour préserver la vie humaine et tout ce qui en découle comme bienfaits, parmi lesquels la vue. Le musulman est donc tenu de protéger cette grâce, en recourant autant que possible aux moyens de prévention et de soin, conformément à la règle : « Nul tort ne doit être causé, ni subi. »
Et si Allah ne lui a pas destiné la conservation de cette faveur, sa patience le conduira au Paradis. Ainsi, la Charia établit un équilibre parfait : elle appelle à la gratitude lorsque la grâce est présente, et à la patience confiante lorsqu’elle est retirée.
C’est dans cet esprit que s’inscrit la belle initiative organisée ce jeudi 9 octobre par la Grande Mosquée de Paris, à l’occasion de la Journée mondiale de la vue. À cette occasion, ses portes seront ouvertes pour des examens oculaires gratuits, destinés aux adultes comme aux enfants. Cette démarche n’est pas seulement une action de santé publique, mais le prolongement du message de l’islam : prendre soin de l’être humain, préserver son corps et ses sens, et rappeler la valeur inestimable du don de la vue.
En ces temps où cette grâce est souvent négligée, par l’abus des écrans ou le manque de prévention, nous avons grand besoin de telles initiatives. Elles nous rappellent que la prévention est une forme de gratitude concrète envers Allah, pour Ses bienfaits, et que le soin de la vue fait partie de la préservation de la vie, l’un des objectifs essentiels de la Charia.
Beaucoup de gens traitent leur vue avec insouciance, jusqu’à ce qu’ils soient frappés par une baisse de la vue ou même, et qu’Allah nous en préserve, d’une cécité, en mot, l’irréparable. Le sage, lui, préserve la grâce tant qu’il en jouit, et se prépare à l’accueillir avec satisfaction et patience lorsque l’épreuve survient. Ainsi, le hadith réunit deux sens complémentaires : la gratitude lorsque la grâce est présente, et la patience lorsqu’elle est perdue, deux attitudes qui mènent toutes deux au Paradis.
En conclusion, ce hadith nous enseigne que la perte de la vue n’est pas la fin du chemin, mais le commencement d’un grand espoir auprès du Seigneur, pour celui qui endure avec patience et confiance. Il constitue également un appel concret à préserver cette grâce par tous les moyens disponibles et à profiter des initiatives médicales bénéfiques, qui témoignent du soin que l’islam accorde à l’être humain. Profitons donc de la santé de nos yeux tant qu’ils nous servent, en les employant à se souvenir de Dieu, à lire Son Livre et à contempler Ses signes dans la création. Et si la vue vient à s’éteindre, soyons patients, dans l’espérance du Paradis dont la largeur égale celle des cieux et de la terre.
Nous implorons Allah de faire de nous des reconnaissants dans la prospérité, des patients dans l’épreuve, et d’accorder à toute personne éprouvée une meilleure compensation que ce qu’elle a perdu. Il est le Protecteur et le Tout-Puissant.
*Article paru dans le n°80 de notre magazine Iqra.
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