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Récits célestes (n°67) - L’histoire de la citoyenneté dans la tradition prophétique

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Par Cheikh Mohamed Amine Haddou

La question de la citoyenneté occupe une place essentielle dans la religion musulmane. Des témoignages issus de la Sunna pratique en attestent : la législation islamique tenait compte des instincts humains, tout en leur apportant la mesure de raffinement et d’organisation requise par les circonstances.


On relève notamment la reconnaissance de la nature humaine, attachée à la terre dont elle est issue. Le Prophète, que la paix et la bénédiction soient sur lui, vécut à La Mecque et l’aima, bien que la plupart de ses habitants n’aient pas cru en son message. Il permit donc à ses compagnons d’émigrer en Abyssinie et fit l’éloge de son souverain en disant : « En terre d’Abyssinie règne un roi auprès duquel nul n’est lésé, gagnez ses contrées jusqu’à ce que Dieu vous accorde un soulagement et une issue à ce que vous traversez. » (Rapporté par El-Bayhaqî dans al-Sunan el-Kubrā, n°17734). Une partie des compagnons émigra ainsi et devint, durant plusieurs années, un élément du tissu social abyssin, jusqu’à ce que certains d’entre eux décident, longtemps après, de partir s’établir à Médine.


Le Prophète, paix et bénédiction sur lui, fut lui aussi contraint de quitter La Mecque malgré lui, en raison de la persécution et des mauvais traitements que lui infligeaient ses habitants ainsi qu’à ses partisans. Il n’en demeura pas moins profondément attaché à sa terre natale. Ibn Abbâs rapporte que le Messager d’Allah déclara : « Que tu es douce, Ô cité, et que je t’aime ! Si mon peuple ne m’avait pas chassé, je n’aurais jamais choisi d’habiter ailleurs. » [1] 


Dès que les compagnons se furent établis à Médine, le Prophète institua un pacte de fraternité entre les émigrés et les partisans, faisant d’eux une seule et même communauté. Les Ansâr partagèrent avec les Mouhâjiroûn tout ce qu’ils possédaient. Cette fraternité alla même plus loin encore, au point que l’émigré pouvait hériter du partisan et réciproquement. Le lien qui les unissait associait en même temps la foi et l’appartenance commune à une même patrie.


Par la suite, le Prophète, que la paix et la bénédiction soient sur lui, rédigea un document d’une grande importance, qui tint lieu de constitution pour l’État islamique naissant à Médine. Cette communauté étant encore à ses débuts, il y exposa les droits et les devoirs de chacun et aborda la situation de toutes les composantes de la société, y compris les « Gens du Livre » qui résidaient dans la ville. Ce texte resserra ainsi les liens de la société, en renforçant la cohésion, et rendit plus claires et mieux organisées les relations entre les différents membres de cette nouvelle patrie.


Le Messager d’Allah, paix et bénédiction sur lui, décida ensuite de retourner à Médine pour y demeurer, après être entré à La Mecque en conquérant, lors de la huitième année de l’Hégire. Il mit en lumière le mérite des Ansâr, habitants originels de Médine, en disant : « Si les gens empruntaient une vallée et que les Ansâr prenaient un défilé, je choisirais le défilé des Ansâr. » (Authentifié de manière unanime par al-Boukhâri et Muslim). Il avait auparavant invoqué Dieu afin qu’Il fasse aimer cette cité, si chère à son cœur : « Seigneur, fais-nous aimer Médine comme nous aimons La Mecque, ou davantage encore ; rends-y la santé, bénis-nous dans son Sâʿ et son mudd, et déplace sa fièvre pour la mettre à El-Juhfa. » (Authentifié de manière unanime par al-Boukhâri et Muslim).


Médine devint ainsi l’une des contrées qu’il chérissait le plus. C’est là qu’il vécut ses derniers instants et qu’il fut inhumé, que la paix et la bénédiction d’Allah soient sur lui.



[1] Rapporté par al-Tirmidhî dans les Sunan, et également par les auteurs d’autres recueils, sous la formulation suivante : « Par Allah, tu es la meilleure terre de Dieu et la plus aimée de Dieu, et si je n’avais pas été contraint d’en sortir, je ne serais jamais parti », en référence à La Mecque.



*Article paru dans le n°88 de notre magazine Iqra.

 


 

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